[L’emprise numérique : comment Internet et les nouvelles technologies ont colonisé nos vies | Cédric Biagini]
L’essai de Cédric Biagini, écrivain militant, est un pavé très digeste de 445 pages jeté dans la mare consensuelle des nouvelles technologies toujours plus envahissantes. Bien structuré en trois parties : « Le déferlement numérique » ; « Les illusions numériques » ; « Le capitalisme numérique », scindées en onze chapitres, solidement étayé de notes bibliographiques courant sur une trentaine de pages, l’ouvrage pointe les dérives et les risques que la technologie numérique permet, amplifie et accélère. Ecrit sobrement, sans jargon et sans esbroufe, incluant sans relâche et avec fluidité dans son propos des citations pertinentes d’auteurs concernés (philosophes, bibliothécaires, sociologues…), Cédric Biagini assène des vérités qui font mal car elles découlent d’une lucidité sans fard et d’un raisonnement imparable. Le lecteur pourra toujours tergiverser, maugréer, botter en touche, les vues prospectives à très court terme font froid dans le dos mais comme pour la destruction quasi programmée de la biodiversité, on laisse caracoler le désastre numérique annoncé. Pourtant, en dépit de quelques analyses prévisionnelles, l’auteur centre son essai sur les dégâts déjà bien visibles aujourd’hui tant sur le « plan politique, social, culturel que psychologique ». La technologie numérique repose sur le mysticisme d’où émanent l’illusion et l’utopie. A la fièvre communicationnelle, la cybernétique ajoute son propos délirant visant à émanciper l’homme connecté des contingences d’une matière putrescible et d’un corps débile. Tout regard critique porté sur la numérisation du monde est jugé réactionnaire. Les récalcitrants n’auront qu’à s’adapter s’ils ne veulent pas s’exclure de la marche aveugle et forcée des sociétés où la technologie règne en maîtresse despotique.
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