Une lecture qui fait froid dans le dos
Catherine “Kitty” Genovese est une jeune femme pétillante et dynamique. Lorsqu’elle emménage dans un quartier tranquille du Queens à New-York, elle se doute pas que sa vie va s’arrêter de façon tragique.
Par une nuit froide de Mars 1964, Kitty rentre vers 3 heures de son travail (elle est barmaid), lorsqu’elle se fait agresser par un inconnu au bas de son immeuble. Elle hurle, elle lutte. Son calvaire va durer plus d’une demi heure. Son agresseur va à plusieurs reprises la poignarder, la violer, puis il va l’achever. Elle mourra sur le trajet de l’hôpital.
Le lendemain une simple phrase relatera les faits dans le journal : “ Une habitante du quartier meurt poignarder devant chez elle.”
Tout aurait pu s’arrêter là, mais l’enquête met au jour une réalité bien plus sordide. Plusieurs témoins affirment avoir assisté au drame, mais aucun n’a porté secours à Kitty et n’a appelé les secours. Peut-être aurait-elle pu être sauvée ?
Bref, Kitty Genovese est la victime d’un prédateur sexuel, mais elle est aussi la victime de l’indifférence de ses voisins.
Didier Decoin, membre de l’académie Goncourt, auteur et cinéaste reconnu, nous relate dans ce roman, un fait divers authentique qui est devenu un cas d’école en psychologie sociale. “Le syndrome Kitty Genovese” a fait l’objet de nombreuses expériences afin d’expliquer le comportement indifférent de témoins d’agression. Pour plus d’information sur ce sujet c’est ICI.
Il introduit dans ce fait divers un personnage inventé de toute pièce. Nathan Koschel habite le même immeuble que la victime. Son épouse et lui étaient absents lors du drame. Nathan apprendra le crime le lendemain et sera le spectateur d’un procès très étrange. On y juge non seulement Winston Moseley, l’agresseur de Kitty, mais on y dénonce aussi le comportement inexcusable des témoins de l’horreur.
C’est donc aux côtés de ce voisin désabusé que nous suivons toute cette sombre histoire.
Decoin prend la liberté d’impliquer un nombre impressionnant de témoins pour accentuer l’acte de lâcheté. La victime a lutté pour sa vie, elle a crié “ à l’aide, on me poignarde, à l’aide”, mais personne ne lui a porté de l’intérêt, personne n’a quitté son nid douillet pour la sauver, personne n’a prévenu la police. Aucun secours pour cette jeune femme…Seule face à sa mort.
Comment est-ce possible ? Nous parlons d’un être humain, non ? Sa vie ne vaut rien ?
Il ne faut pas oublier le vrai coupable : Winston Moseley. Il a ôté la vie de Kitty Genovese, mais aussi de plusieurs autres jeunes femmes. C’est un prédateur. Il rôde la nuit pour assouvir ses pulsions morbides. Pourtant, en apparence, il est un mari attentionné et un père exemplaire.
En romançant un fait divers, Didier Decoin nous offre un roman poignant, troublant et percutant. Je n’irais pas jusqu’à dire qu’il est le meilleur roman que j’ai lu depuis le début de l’année, mais j’avoue qu’il n’est pas dénué d’intérêt. Les 186 pages m’ont amené à méditer :
L’homme est-il un lâche ?, Quelle est la valeur de la vie d’un inconnu ?, et Pourquoi survit la “loi du chacun pour soi” ?
Voir l'article original :
Est-ce ainsi que les femmes meurent ?
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