Jack Fitzgerald, métis maori aux allures de colosse, est capitaine de la police d’Auckland.
Il s’y est engagé suite à la disparition de sa femme Elizabeth et de leur petite fille, 25 ans auparavant, et son obsession à les retrouver n’a pas faibli avec les années.
Afin de résoudre une sordide affaire de meurtre avec mutilation, le procureur lui adjoint la jeune Ann Waitura, experte en criminologie, qui ne se laisse pas impressionner par cet homme qu’elle considère comme un malade, un fou. Il faut dire que Jack a une fâcheuse tendance à voir en chaque criminel le potentiel responsable de la perte de sa famille, et le lui fait payer par un passage à tabac pas vraiment règlementaire… qu’il est alcoolique, cocaïnomane, et j’en passe !
Mystérieux rites maoris, cannibalisme… de fausses pistes en véritables traquenards, les deux acolytes nous mènent dans les méandres d’une enquête très angoissante.
Certains aspects de ce roman m’ont vraiment plu, mais ce plaisir a été gâché par plusieurs défauts qui m’ont agacée. L’histoire est certes passionnante, l’action est menée tambour battant tout au long du récit, les rebondissements sont multiples et les personnages haut en couleur. Le personnage de Jack, notamment, est intéressant car sa part d’ombre est développée de façon assez inhabituelle. De plus, le tandem qu’il forme avec la jeune criminologue, s’il est au départ peu original, passe plutôt bien, l’auteur évitant (même si c’est parfois de justesse) de tomber dans la caricature.
A contrario, c’est bien dans la caricature qu’il verse, à mon avis, concernant plusieurs points. J’ai trouvé tout d’abord les analyses de la criminologue quelque peu rapides, elle semble avoir cerné le tueur en quelques minutes, avec pour seul support le cadavre qu’il a laissé… même Benton, le profiler attitré de Patricia Cornwell, n’est pas aussi efficace ! Ensuite, cette longue confession finale du coupable, éclairant les zones d’ombre de l’enquête, ressemble trop pour moi à la conclusion d’une mauvaise série B. Et puis, surtout, tous ces morts (je vous assure, je n’ai jamais vu une telle hécatombe de personnages principaux ou secondaires !)… cela finit par manquer de crédibilité. A tel point qu’en y réfléchissant, quelques jours après avoir terminé ma lecture (comme quoi, c’est un livre qui doit néanmoins m’avoir marquée), je me suis demandée s’il ne s’agissait pas justement de la volonté de l’auteur, que d'enfreindre l'une des règles tacitement établies dans la plupart des polars, qui consiste à... bon, j'ai un problème : si je continue, je dévoile la fin de l'histoire, et j'ai beau tourner mes méninges dans tous les sens, je ne vois pas d'autres moyens de m'expliquer. Disons que ce qui m'a semblé dans un premier temps être un jeu de massacre inutile et exagéré est peut-être à la réflexion un moyen d'incarner le roman noir dans toute sa splendeur, et par la même occasion de déstabiliser le lecteur. Et si c'est le cas, c’est réussi !
Un dernier point, encore, m’a gênée : Caryl Ferey fait preuve, par moments, d’un lyrisme qui paraît incongru par rapport au style, simple, qu’il utilise par ailleurs. Pour exemple, cela donne de curieuses métaphores, comme : « (…) le sourire qu’il lui envoya avait des larmes de dégoût au bord des lèvres » ou « Le soleil tombait dans la baie d’Auckland. A la dextérité du plongeon, le gars savait nager » (le « gars », c’est le soleil).
Je me rends compte qu’avec tout ce que je viens d’écrire, vous allez sûrement vous dire que je n’ai pas aimé ce livre, finalement. Et bien, je dois vous avouer qu’en dépit de ce que j’y ai trouvé de négatif, ce roman m’a tout de même donné envie d’en lire d’autres de l’auteur.
Je crois que c’est lié à son talent pour inventer et raconter son histoire, et son manque total de compassion envers ses personnages… qui fait effectivement de "Haka" un polar vraiment noir.
Conclusion : je m'en vais de ce pas me procurer la suite d'"Haka" ("Utu")!
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