5 livres correspondent à cette oeuvre.
Il y a actuellement 3 notes de lecture correspondant à cette oeuvre (voir ci-dessous).
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[Les vivants et les ombres | Diane Meur] |
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Mariecesttout
Sexe: Inscrit le: 18 Aoû 2007 Messages: 149
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Posté: Ven 25 Oct 2013 1:59
Sujet du message: [Les vivants et les ombres | Diane Meur]
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Alors là, c'est le cas de le dire, les murs ont des oreilles! A l'affut de tout, la moindre conversation entre humains ou entre casseroles.
C'est donc une saga familiale ,racontée uniquement à travers ce que cette maison peut saisir des évènements extérieurs d'une histoire très riche en évènements, celle de cette région au départ Pologne devenue Galicie, pendant une centaine d'années. Et surtout , bien sûr, de la vie familiale qu'elle abrite, très mouvementée elle aussi. Le chef de famille , fils de confiseur, a réussi à épouser la fille d'un comte , "quartiers de noblesse irréprochables et profil de mouton" , et , dans la propriété, construit aussi une petite usine de confiserie qui semble ne fabriquer qu'une sorte de bonbons , les pastilles de la Vierge, qui deviendront plus tard les pastilles de Sissi , les opérations de marketing étant déjà d'actualité à l'époque..
Révolutions, émeutes, et fin de la féodalité , mais aussi antisémitisme marqué pour la vie extérieure, amours contre son rang et enfants illégitimes à l'intérieur.
Bref, une vie chargée...et on ne peut en vouloir à cette maison d'avoir ...déménagé.
Très agréable à lire, très bien documenté, et moi qui connaissais très peu l'histoire de ces pays, j'ai appris beaucoup de choses!
Je me lève aussi la nuit pour essayer d'entendre ce que mes casseroles ont à se dire, mais je pense que cela va vite s'arranger?
Un petit extrait:
Ce ne fut pas la gestion de Wioletta qui coula la sucrerie, bien qu'on prédit dans la région qu'il ne pouvait rien arriver de mieux à une affaire ainsi tombée en quenouille. Ce ne furent pas non plus les modestes revendications de ses employés, ni le boom du sucre russe, qui restait cher à importer. Ce qui perdit l'entreprise si florissante de Jozef fut la décision de l'archiduc Rodolphe , en janvier 1889 , de mettre fin à ses jours dans son pavillon de chasse de Mayerling , avec sa très jeune maîtresse la baronne Vetsera.
J'appris ce drame, comme de juste, dans les cuisines . J'arrivai là un matin, avide de papotages fleurant bon, eux, le monde des vivants; et qel ne fut pas mon étonnement en découvrant , autour de la grande table, notre personnel féminin changé en assemblée de pleureuses!
.....
A l'étage des maîtresses, on ne pleurait pas; c'était pourtant là qu'il y aurait eu le plus de quoi pleurer. Elles l'ignoraient encore, les deux demoiselles, mais c'était, à terme, la fin de leur fortune.
Les "Délices de Sissi"? Ce nom, décidément, sonnait comme une mauvaise blague. En fait de délices, la mère du suicidé avait eu, en vingt ans: un beau-frère, Maximilien, fusillé au Mexique; une belle-soeur, veuve du précédent, devenue folle de chagrin; un cousin, l'extravagant Louis II de Bavière, retrouvé noyé dans des circonstances obscures; sans compter des autres parents et amis, qui ,autour d'elle, sombraient dans la démence ou mouraient atrocement. Mayerling était le drame de trop. Dès la semaine suivante affluèrent ici des courriers de pharmaciens annulant leurs commandes, il fallut suspendre la production, faire dessiner de nouvelles boîtes portant la sombre mention " Pastilles Incarnadines" et les mettre hâtivement en vente pour éponger le manque à gagner........
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[Les Vivants et les Ombres | Diane Meur] |
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Message |
Latulu
Sexe: Inscrit le: 19 Avr 2006 Messages: 315
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Posté: Lun 06 Avr 2009 22:02
Sujet du message: [Les Vivants et les Ombres | Diane Meur]
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Si je m'en étais tenu à la présentation faite en quatrième de couverture, je n'aurais probablement jamais lu ce livre. Heureusement que c'était une figure imposée par le Prix des lecteurs LDP 2009 ce qui m'a permis de vérifier une fois de plus que les premières impressions ne son pas toujours les meilleures.
Quelle belle idée de laisser la parole à une demeure pour remonter la généalogie d'une famille polonaise de la fin du XVIIIe siècle jusqu'au tout début du XXe. Parce qu'en réalité, cette maison de maître est dotée d'une véritable âme et profite de sa qualité de témoin privilégié pour épier les différentes générations qui se succèdent au domaine.
Cette saga familiale, servie par un style impeccable, aborde une multitude de thèmes sans jamais lasser le lecteur. On se laisse facilement emporter sur les traces de l'ambitieux Josef Zemka qui n'hésitera pas à pousser sa fille aînée dans les bras de son cousin pour remplacer le fils que sa femme Clara n'a pas su lui donner : « C'en est de trop, madame ! Vous m'avez piégé dans ce mariage et vous n'êtes bonne à rien. Tudieu ! Je sais faire des fils, moi, j'en ai eu un, il y a six mois de la gamine des Dorochenko. C'est vous qui y mettez de la mauvaise grâce ! Vous vous moquez de moi !» Devant une telle muflerie, difficile de reprocher à Clara de trouver refuge dans les bras du précepteur de ses filles : Jamais il ne lui était venu à l'idée qu'elle pouvait être belle. Ni à lui ni à personne d'autre. Et pourtant elle l'était. Elle l'était invisiblement, elle l'était seulement depuis une heure, pour ses seuls yeux à lui. Lui, Zygmunt Borowski, possédait un trésor, un trésor caché - il tressaillit soudain de joie et de douceur, osa enfin la serrer contre sa poitrine. Et elle répondit, son bras s'appesantit, moelleux et plein de langueur, sur ses épaules, en goûta à travers l'étoffe la chaleur masculine, la charpente un peu dure… Il lui semblait qu'elle venait de naître, qu'elle sortait d'un interminable rêve chargé d'ennui et de tristesse, qu'elle s'était enfin trouvée.
Et l'histoire s'ensuit ainsi à pas plus ou moins comptés, jalonnée pas les soubressauts de l'Histoire qui secouent la Galicie où s'opposent les intérêts des Polonais et des Ruthènes (Galiciens ukrainiens).
Les femmes, souvent cantonnées dans le rôle subalterne qui leur est destiné, occupent une place importante dans ce roman. Elles se montrent finalement souvent bien plus fines que leurs compagnons et finissent par tirer leur épingle du jeu, sous l'œil complice de la demeure narratrice, véritable porte parole de l'auteur.
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[Les vivants et les ombres | Diane Meur] |
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sentinelle
Sexe: Inscrit le: 26 Juin 2007 Messages: 228 Localisation: Bruxelles
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Posté: Sam 16 Fév 2008 12:21
Sujet du message: [Les vivants et les ombres | Diane Meur]
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"Les vivants et les ombres" est une saga familiale déployée sur plus d'un siècle d'histoire.
Nous sommes au XIXe siècle en Galicie, région de l'Europe de l'Est située le long des Carpates. Possession de l'empire austro-hongrois des Habsbourg depuis le premier partage de la Pologne en 1772, carrefour multiculturel dans lequel se côtoient avec quelques difficultés polonais, ruthènes, russes, prusses et juifs, ce roman nous conte l'ascension puis la décadence de Jozef Zemka, polonais ambitieux qui veut reconquérir le domaine fondé par son noble ancêtre désargenté en mariant la fille de l'actuel propriétaire.
L'originalité du roman repose sur le fait que la narratrice n'est autre que la maison du domaine. Mariages, ambitions, relations difficiles entre polonais (propriétaires et seigneurs des terres) et ruthènes (serfs), fin de la féodalité, début de l'industrialisation, émeutes, luttes pour l'indépendance polonaise, antisémitismes, amours, adultères, trahisons, tous ces petits et grands événements seront épiés et commentés sans complaisance par cette noble maison qui se cache encore pour un temps derrière son fronton néo-classique.
Mais plus que tout, la narratrice s'intéresse aux femmes du domaine, à leur destin souvent bridé par la bienséance et le contexte historique de l'époque.
Et il y a de quoi observer ! Clara, la femme de Jozef Zemka, donnera naissance à cinq filles, au plus grand désespoir de son époux. Cinq fardeaux à marier, pas de descendant mâle pour reprendre le domaine, cinq destins de femmes finement analysées par notre fidèle narratrice.
Condamnées à des mariages arrangés, à la réclusion domestique, au couvent, certaines trouveront pour un temps le bonheur dans les bras d'un homme aimé mais la culpabilité et les conventions reprendront assez vite le dessus. Et pourtant, ici aussi la révolte gronde ! Certaines n'hésiteront pas à briser les chaînes de la convention sociale pour assumer leur choix et goûter à la liberté. Notre noble narratrice, féminine dans l'âme, ne sera d'ailleurs pas en reste dans cette dernière aventure...
Diane Meur nous convie donc à une grande saga familiale ayant pour cadre la Galicie au XIXe siècle, région mal connue et au passé historique mouvementé.
On pouvait craindre une certaine lourdeur et quelques longueurs lorsque nous voyons le nombre de sujets traités, et pourtant il n'en est rien. Diane Meur a des talents de conteuse et une plume légère et ciselée nous rapporte tous ces faits avec une facilité de lecture déconcertante.
Diane Meur a reçu pour "Les vivants et les ombres" le Prix Victor Rossel 2007 (le plus prestigieux prix littéraire belge) et le Prix Rossel des jeunes.
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