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Les notes de lectures recherchées

18 livres correspondent à cette oeuvre.

Il y a actuellement 10 notes de lecture correspondant à cette oeuvre (voir ci-dessous).

Notation moyenne de ce livre : (13 livres correspondant à cette oeuvre ont été notés)

Mots-clés associés à cette oeuvre : activisme, activisme_politique, afrique, Afrique liberia, amerique, chimpanze, destin, destin de femme, enfant, etats-unis, famille, femme, froideur, gauchisme, guerre, guerre-civile, guerre civile, guerre du vietnam, histoire, humanite, liberia, politique, primate, revolte, revolution, singe, terrorisme, violence

[American Darling | Russell Banks]
Auteur    Message
andras



Sexe: Sexe: Masculin
Inscrit le: 20 Sep 2005
Messages: 1800
Localisation: Ste Foy les Lyon (69) -- France

Posté: Lun 13 Fév 2017 10:35
MessageSujet du message: [American Darling | Russell Banks]
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American Darling est un magnifique roman-fleuve qui retrace l'itinéraire d'une américaine, Hannah Musgrave, depuis les années 60 et le début des années 70 où, alors jeune étudiante, elle s'est engagée dans le Mouvement des Droits Civiques, puis le SDS (Students for a Democratic Society) puis s'est radicalisée dans la "propagande armée" du groupe des "weathermen" qui, devenu clandestin, s'est alors appelé "Weather Underground". Après avoir vécu quelques années dans la clandestinité aux Etats-Unis, elle part avec un ami en Afrique et une nouvelle vie commence pour elle. Elle se mariera avec un africain et ils auront trois enfants. Quand le roman commence, au tout début du nouveau millénaire, elle a la soixantaine et dirige une ferme dans les Adirondacks, une chaine de montagne au Nord de l'Etat de New-York. Elle a décidé de retourner au Liberia d'où elle est partie en 1990 alors que la guerre entre plusieurs factions rivales faisait rage, laissant sur place ses trois enfants.
Véritable plongée dans des contextes historiques peu connus et pourtant terribles (mouvements activistes aux US, guerre civile du Liberia), dénonçant le cynisme de la politique américaine et celui des labos pharmaceutiques qui utilisent les chimpanzés de façon ignominieuse, ce roman est aussi très attachant grâce à ce portait d'une femme que ses choix radicaux ont longtemps enfermée dans une trajectoire tragique, mais qui a su préserver sa dignité et finalement trouver un sens à sa vie déchirée. Dans une interview à Telerama, Russell Banks dit que c'est "le livre le plus noir qu'il ait écrit"(*). Il m'a pourtant semblé que, en dépit de toute cette noirceur qu'elle a cotoyée, Hannah a su préserver cette lumière qu'enfant, elle avait trouvée dans les Adirondacks et qu'elle saura ramener là-bas, après avoir traversé les cercles de l'Enfer.
(*) http://www.telerama.fr/livres/26828-american_darling_russell_banks.php
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[American Darling | Russell Banks, Pierre Furlan (Traduc...]
Auteur    Message
fabula




Inscrit le: 24 Nov 2011
Messages: 96

Posté: Ven 25 Nov 2011 0:22
MessageSujet du message: [American Darling | Russell Banks, Pierre Furlan (Traduc...]
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Dans ce roman paru à l'automne 2005 Russell Banks imagine une américaine, Hannah Musgrave, la soixantaine, responsable d'une ferme écologique. Le récit qu’elle nous livre est presqu’une confession, elle revient sur son parcours, parfois chaotique : activiste politique dans sa jeunesse, membre d'un mouvement révolutionnaire (le Weather Underground), elle a dû fuir son pays et se réfugier au Ghana d'abord, puis au Libéria, sous une fausse identité. Là, elle a épousé le ministre de la santé, Woodrow Sundiata et mis en place un sanctuaire pour sauver les chimpanzés, menacés par les laboratoires pharmaceutiques américains. Dix ans plus tard, il lui faut fuir à nouveau, pour échapper à la guerre civile qui fait rage dans le pays ; son mari est cruellement assassiné et elle laisse derrière elle ses fils.
Ce roman est absolument renversant, il mêle fiction et Histoire, l’auteur pointe les relations douteuses qui unissent les Etats-Unis et le Libéria. L'héroïne, étrange, pas vraiment sympathique, a une personnalité complexe, et est en quête de sa véritable identité, c’est pourquoi elle retournera en Afrique bien plus tard afin de clore une histoire brutalement interrompue, d'y mettre un point final. Elle nous offre une vision froide, sans complaisance de sa vie mais sans jamais non plus porter de jugement. On se laisse fasciner dès les 1ères pages par ce récit engagé, sous la plume d’un auteur dont les qualités d’écriture ne sont plus à prouver
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[American darling | Russell Banks, Pierre Furlan (Traduc...]
Auteur    Message
ingannmic



Sexe: Sexe: Féminin
Inscrit le: 22 Aoû 2008
Messages: 737
Localisation: Mérignac

Posté: Sam 28 Nov 2009 19:57
MessageSujet du message: [American darling | Russell Banks, Pierre Furlan (Traduc...]
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Il y a 11 ans, Hannah Musgrave, une blanche américaine, a quitté précipitamment le Libéria, où elle vivait mariée à Woodrow, un membre du gouvernement. C’est l’assassinat de son époux et le déclenchement d’une terrible guerre civile qui a motivé ce départ. Elle a laissé sur place ses trois fils, dont elle n’a plus eu de nouvelles.
De retour aux Etats-Unis, elle a racheté une ferme dans les Adirondacks, où elle pratique l’élevage biologique. Voici un an qu’elle a soudainement ressenti le besoin de repartir en Afrique afin de tenter de découvrir ce qu’il est advenu de ses garçons.
Revenue de cette quête, Hannah nous raconte ce qu’elle a découvert, et en remontant encore beaucoup plus loin dans ses souvenirs, elle évoque les événements et les raisons qui l’ont menée en Afrique, puis ceux qui l’ont poussée à la fuir.

Ce roman m’a passionné ! En suivant le parcours hors du commun d’Hannah, des Etats-Unis à l’Afrique, des années 60 à l’aube du XXIème siècle, le lecteur découvre une page de l’histoire américaine vue sous l’éclairage des aspirations et de l’état d’esprit d’une jeunesse issue d’un milieu intellectuellement et matériellement favorisé. En période de guerre froide, ces jeunes ont puisé dans des événements tels que la guerre du Viet-Nam ou la crise de Cuba, les motivations de leur engagement politique et philosophique, qui les mène parfois jusqu’à un activisme terroriste. C’est notamment le cas d’Hannah, qui considère que seul le radicalisme et le refus de toute concession peuvent servir son idéalisme, et qui devient dans son pays une criminelle recherchée.
Paradoxalement, elle porte sur son engagement et celui des autres un regard assez critique, s’interrogeant sur ses motivations profondes : est-ce par sentiment de culpabilité, parce qu’elle se sent injustement privilégiée ? Ou éprouve-t-elle le besoin d’être reconnue pour ce qu’elle est capable d’accomplir, seule, et loin d’un cercle familial où elle n’a jamais véritablement trouvé sa place ? D’autres s’accommodent avec moins de scrupule de leur opportunisme, tel son camarade Zack, qui passe de l’humanitaire au trafic d’œuvres d’art africaines, dès lors que les facilités financières accordées par papa et maman prennent fin.
Toujours est-il que c’est par l’entremise de ce même Zack qu’Hannah échoue en Afrique, où elle se dissimule sous une fausse identité, et qui est de plus le lieu rêvé pour vivre en adéquation avec ses théories sur l’égalité raciale. Là aussi, l’ironie de la situation finit par la rattraper : c’est elle qui finit par souffrir de ségrégation. Entre l’Afrique et les Etats-unis, les différences sont trop grandes, le fossé entre les deux cultures immense, et épouser un libérien n’y change rien… elle est toujours d’abord considérée en tant que blanche américaine.

Russell Banks entremêle Histoire et fiction de façon complètement crédible, et fait d’Hannah un personnage très marquant. Curieusement, je l’ai trouvée attachante : c’est vrai qu’elle fait preuve d’un détachement et d’un froid pragmatisme qui confinent à l’insensibilité, et d’ailleurs elle le reconnaît elle-même, car à aucun moment en revanche on ne peut l’accuser d’être auto-complaisante. Elle avoue ne se sentir aucun instinct maternel, avoir l’impression d’éprouver davantage d’affection pour les chimpanzés dont elle s’occupe que pour ses propres enfants… Et pourtant, le fait qu’elle se pose souvent des questions sur son absence d’émotions, comme si elle tentait de découvrir celle qu’elle est vraiment, derrière cette femme forte et entière, la rend touchante, je trouve.

Tout m’a plu dans « American Darling » : l’histoire (l’Histoire, aussi !), les personnages, l’écriture. Un roman très riche et très enrichissant…
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[American darling | Russell Banks, Pierre Furlan (Traduc...]
Auteur    Message
Automnale



Sexe: Sexe: Féminin
Inscrit le: 30 Oct 2007
Messages: 576
Localisation: Montigny le bretonneux

Posté: Dim 30 Aoû 2009 17:54
MessageSujet du message: [American darling | Russell Banks, Pierre Furlan (Traduc...]
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Ce livre m'a emportée et je l'ai dévoré. Très bien écrit.
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[American Darling | Russell Banks]
Auteur    Message
Brujula



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Inscrit le: 20 Avr 2006
Messages: 483

Posté: Dim 09 Nov 2008 13:24
MessageSujet du message: [American Darling | Russell Banks]
Commentaires : 2 >>

Qu'en dire?
C'est un roman intéressant, certes, qui aborde de nombreuses problématiques, dont la politique américaine dans les années 70 puis dans les années 80, puis à l'heure actuelle, les guerres civiles dans les pays africains, et l'influence des pays occidentaux dans ces pays, les relations intrafamiliales.... et la protection des chimpanzés (et j'avoue que ce dernier point sur lequel l'auteur insiste jusque dans l'épilogue m'a laissée de marbre).
Je suis d'accord avec Gérard: il y a des longueurs inutiles, qui ont beaucoup ralenti ma lecture, car j'avais du mal à m'y intéresser, et c'est très désordonné.
Mais c'est un roman intéressant quand même (on a quand même beaucoup de mal à éprouver quelque sympathie que ce soit pour Hannah....)
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[American darling | Russell Banks, Pierre Furlan (Traduc...]
Auteur    Message
Latulu



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Inscrit le: 19 Avr 2006
Messages: 315

Posté: Mar 19 Fév 2008 22:12
MessageSujet du message: [American darling | Russell Banks, Pierre Furlan (Traduc...]
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Et s'il n'était question que d'expériences de laboratoire ?
Papa pédiatre expérimente ses thèses professionnelles sur sa fille.
Hannah choisit la voie de l'activisme violent pour s'opposer à la guerre du Vietnam.
Les USA pilotent le Libéria à distance.
L'industrie pharmaceutique teste ses médicaments sur les "rêveurs" (les singes).
Woodrow Sundiata s'essaie à la vie occidentale pour mieux intégrer les hautes sphères du pouvoir…

Que dire de ce livre si ce n'est que c'est un roman complexe qui aborde des thèmes très intéressants. Une lecture exigeante mais qui mérite vraiment qu'on s'y plonge.
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[American Darling | Russell Banks]
Auteur    Message
sentinelle



Sexe: Sexe: Féminin
Inscrit le: 26 Juin 2007
Messages: 228
Localisation: Bruxelles

Posté: Lun 18 Fév 2008 15:37
MessageSujet du message: [American Darling | Russell Banks]
Commentaires : 4 >>

Hannah Musgrave, proche de la soixantaine et propriétaire d'une ferme au Keene Valley en Amérique, s'est mise à rêver de sa maison de Monrovia au Libéria. Cela fera dix ans qu'elle a fuit le pays en proie à la sauvagerie de la guerre civile.

Citation:
Après bien des années où j'ai cru que je ne rêvais plus jamais de rien, j'ai rêvé de l'Afrique. C'est arrivé une nuit de la fin du mois d'août, ici, dans ma ferme de Keene Valley, pratiquement le lieu le plus éloigné de l'Afrique où j'ai pu m'installer. J'ai été incapable de me souvenir de ce que racontait ce rêve, mais je sais qu'il se déroulait en Afrique, au Libéria, dans ma maison de Monrovia. Les chimpanzés avaient dû y jouer un rôle, parce que des visages ronds et bruns semblables à des masques flottaient encore dans mon esprit quand je me suis réveillée bien à l'abri dans mon lit, dans cette vieille maison au milieu des monts Adirondacks. Et j'étais submergée par une évidence : j'allais bientôt y retourner.


Y retourner pourquoi ? Pour expier sa culpabilité d'avoir fuit le Libéria tombé sous le joug de la folie des hommes avides de pouvoir, abandonné sa maison, laissé la dépouille de son mari, largué ses enfants, cédé à l'appétit vorace des soldats les chimpanzés qu'elle avait pris en affection bien qu'ils servaient de cobayes pour le compte de sociétés pharmaceutiques américaines ? Retourner sur les scènes du crime et rechercher ses fils – pour autant qu'ils soient encore en vie – aux doux surnoms de Pire-que-la-mort, Mouche et Démonologie?
Citation:
QUAND EST-CE QU'IL EST TEMPS de fuir son pays ? "Quand on tue vos chiens", voilà ce qu'on dit. Il n'y a pas eu d'avertissement – il y en a rarement -, pas même le bruit d'une voiture ou d'une camionnette qui s'arrête devant le grand portail cadenassé.


Sur le chemin de ce retour en Afrique, Hannah Musgrave ne peut s'empêcher de revenir sur son passé : comment une jeune fille issue d'un milieu bourgeois, engagée dans les mouvements contestataires de l'Amérique des années 60, activiste recherchée par le FBI et la CIA après avoir rejoint un groupuscule radical d'extrême gauche utilisant la violence et les attentats à l'explosif, a-t-elle pu se transformer en femme au foyer docile et dépendante de son époux libérien et mère de trois enfants en Afrique? Qu'a-t-elle fait de ses révoltes et de ses colères contre les injustices en s'enfermant dans sa demeure à l'abri de la pauvreté des autochtones ?

Retour au point de départ. Hannah s'installe sous une fausse identité au Libéria après avoir échappé aux autorités américaine à l'aide d'un camarade de combat, seule et isolée de tous.

Il nous faut remonter au début du XIXe siècle pour comprendre les particularités du Libéria. Les Etats-Unis veulent installer un comptoir à leur service en Afrique de l'ouest.
Le prétexte trouvé est de favoriser, au début des années 1820, le retour des victimes de la traite négrière (les plus remuants et les plus gênants) sur le sol africain. Cette colonie d'esclaves libérés s'organisèrent et constituèrent la république indépendante du Libéria. Et c'est ainsi qu'a été créée en un temps record la première colonie américaine. Car très rapidement, les anciens esclaves – appelés les amérikos - écartent du pouvoir les autochtones noirs de la région. L'économie repose essentiellement sur le travail forcé imposé par les amérikos aux populations indigènes, en accordant préférentiellement les concessions aux sociétés américaines, facilitant ainsi le pillage des ressources locales au profit des entreprises occidentales.

Dès son arrivée au Libéria, Hannah rencontre Woodrow, ministre délégué à la Santé Publique de la république du Libéria. Hannah est une femme blanche isolée des siens et paumée dans un pays qu'elle ne connaît pas.
Citation:
Je suis tombée dans ses bras, me remettant à pleurer sans pouvoir me maîtriser. J'avais honte et je me sentais bête – une idiote d'américaine aux jambes tremblantes qui tombe dans les bras d'un Africain grand et fort.


Woodrow est un homme ambitieux qui sait que marier une femme blanche pourrait lui apporter quelques crédits auprès de ses supérieurs. Le mariage ne tardera pas.
Citation:
Que voyais-je donc en lui, alors, à part un bienfaiteur et un protecteur ?


En juin 1978, Hannah met au monde son premier enfant. Elle n'est pas de ces femmes qui trouvent dans la maternité un rôle naturel et épanouissant. Au lieu et place de se sentir plus femme, comme on lui avait prédit après son accouchement, elle se sent au contraire davantage étrangère à elle-même. Suivront les jumeaux l'année suivante.
Citation:
De la baleine qui porte un marsouin dans son ventre, je suis passée à la peau de serpent vidée – une enveloppe. Jusqu'à ce que peu à peu, une fois le bébé et, un an plus tard, les jumeaux enfin sortis de moi, je me remplisse de nouveau et, gonflée alors de sang et d'un lait qui se déverse, goutte, ruisselle et parfois même gicle de mon corps, je me rendre compte que j'étais devenue un réservoir nutritif percé, un navire de ravitaillement. Dépersonnalisé. Chosifié. Mon corps transformé en vaisseau privé de tout lien avec mon moi antérieur.


Hannah se dit froide, insensible, incapable d'exprimer ses sentiments à ses enfants qu'elle perçoit comme étrangers à elle-même, comme s'ils n'étaient pas vraiment réels et en éprouve beaucoup de remords.
Citation:
Cependant, j'étais détachée de mes bébés, détachée de façon inhabituelle. Je le sais et je le savais déjà à l'époque parce que, quand il s'est agi de mes chimpanzés, je n'ai pas ressenti le même détachement et j'ai donc pu constater la différence. Je pouvais contempler les yeux ronds et marron des chimpanzés, y compris les grands yeux souvent féroces des mâles adultes, et j'avais l'impression que mon regard plongeait jusqu'à leur âme, atteignait le mystère de leur être essentiel. Mais jamais, pas une seule fois, je n'ai été capable de pénétrer si loin dans les yeux bleus de mes fils.


De femme activiste et rebelle, la voilà transformée en femme au foyer totalement dépendante de son mari libérien. De femme blanche gauchisante, idéaliste, éprise de justice, elle devient cette dame blanche bourgeoise qui demeurera à jamais exclue de ce pays d'Afrique. Voilà un coup dur pour cette femme qui a toujours voulu combattre les préjugés basés sur la couleur de peau et qui se trouve à son tour impuissante à combattre ceux basés sur sa propre couleur.

Citation:
J'aurais tellement voulu être invisible, pourtant ! Ma peau blanche s'affichait, faisait carrément du bruit. Elle proclamait ma caste et mon statut aux oreilles de tous. Et pour cela, l'on me haïssait et l'on m'enviait. Pendant longtemps, au marché, j'ai été accueillie par des regards hostiles et l'on m'a traitée avec froideur. Puis, quand les boutiquiers et les marchands ambulants ont su que j'étais la femme du ministre délégué Sundiata, que j'étais manifestement enceinte de ses œuvres et que j'allais rester au Libéria, la froideur a alterné avec la servilité. Les marchands laissaient les gens ordinaires attendre dans la queue pour me servir en premier. J'aurais pu supporter l'un des deux : le rejet ou la servilité, la haine ou l'envie. Peut-être l'un des deux m'aurait-il même arrangée parfois. Mais les subir ensemble me faisait l'effet d'un orgelet : une douleur impossible à éviter si l'on veut y voir quelque chose.


En 1980, la guerre civile éclate. Hannah veut faire des choix en fonction de ses principes et de ce qu'elle pense devoir à son mari et ses enfants, sans oublier ses chers chimpanzés, les plus démunis entre tous avec lesquels elle aura noué peut-être les liens les plus sincères. Mais a-t-elle encore le choix ? Si oui, lesquels et quelles en seront les conséquences ?

A l'heure du retour, cette femme pétrie de culpabilité et de remords de n'avoir pu sauver le monde ne se pose plus qu'une seule question : quelle sera la sentence prononcée pour ses crimes et ses péchés ?

American Darlign est un magnifique portrait de femme qui veut se poser en tant qu'actrice dans une vie où finalement tellement d'événements historiques, culturels, politiques et sociaux vous broient et vous entraînent tel un fétu de paille prit dans la tornade.

Beaucoup de thèmes seront abordés dans ce roman : la question de l'identité (qui suis-je ? qu'est-ce qui fait que je suis moi ? mes choix ? mes parents ? ma famille ? mon pays ? mon époque ? ma culture ? quel est mon espace de liberté dans la constitution de mon identité ?), la question raciale, l'engagement politique, les différences culturelles, la maternité, l'impérialisme américain, la manipulation, la difficulté de respecter ses propres engagements.

Un roman percutant qui peut se résumer en une simple phrase : quelle est réellement notre marge de manœuvre et quel poids pouvons-nous avoir sur le cour de l'histoire ?

Je laisse une dernière fois la parole à Hannah :

Citation:
Dans la nouvelle histoire de l'Amérique, la mienne n'était que celle d'une petite Américaine gâtée, et l'avait été dès le début.


Un grand roman et un vrai coup de cœur.
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[American Darling | Russell Banks, Pierre Furlan (Traduc...]
Auteur    Message
mapiou



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Localisation: Sceaux

Posté: Jeu 18 Jan 2007 12:15
MessageSujet du message: [American Darling | Russell Banks, Pierre Furlan (Traduc...]
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Le roman de 2006.
Hannah Musgrave m'était antipathique, si froide, acharnée, égoiste.
Seuls les singes, ses "rêveurs" parviennent à lui arracher de la tendresse.
Au fil de sa vie, elle apparait touchante car désarmée. On la croit foide, elle est blessée. On la croit libre, elle est piégée.
Au fond, Hannah Musgrave est malheureuse, perdue dans ses illusions, car elle vit en conflit entre ce qu'elle estime devoir faire et ce qu'elle a envie d'être. Au final, elle détruit tout.
Je viens de voir The constant gardener qui peut faire penser à ce livre.

Les questions que je me pose :
comment un homme peut-il imaginer aussi finement une psychologie aussi passionnante de femme ?
comment Russel Banks fait-il pour insuffler autant de poésie, de spiritualité à ses personnages en les laissant profondément ancrés dans le réel ?
pourquoi a-t'on aussi peu parlé de ce livre époustouflant ?
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[American Darling | Russell Banks, Pierre Furlan (Traduc...]
Auteur    Message
Larkéo



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Messages: 407
Localisation: Bretagne (Côtes d'Armor)

Posté: Dim 07 Mai 2006 9:26
MessageSujet du message: [American Darling | Russell Banks, Pierre Furlan (Traduc...]
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Dur, très dur. Beau.
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[American Darling | Russell Banks, Pierre Furlan (Traduc...]
Auteur    Message
Momo



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Inscrit le: 04 Oct 2005
Messages: 443

Posté: Dim 26 Mar 2006 15:52
MessageSujet du message: [American Darling | Russell Banks, Pierre Furlan (Traduc...]
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Hannah Musgrave a 59 ans et dirige une ferme dans les Adirondacks. Plus jeune, elle a vécu en Afrique, elle en rêve parfois jusqu'au jour où :

« A la place du rêve il y avait maintenant la certitude que j'allais bientôt retourner en Afrique - ou plutôt le pressentiment que je n'ai pris ma décision que plus tard ce jour-là, quand Anthea et moi, après avoir tué les poulets, étions en train de les emballer dans du papier plastique pour les livraisons».

Débute alors le récit de la vie d'Hannah Musgrave, constitué d'allers-retours entre présent et passé, un passé qui commence avec l'engagement politique et révolutionnaire au sein d'un mouvement radical le « Weather Underground » créé à Chicago en 1969.
A la suite d'un malentendu, elle quitte les Etats-Unis pour le Libéria, pays bâti par des esclaves affranchis où elle travaille dans un laboratoire pharmaceutique avant de rencontrer Woodrow Sundiata, avec lequel elle aura trois fils.
Mais l'instabilité politique et l'insécurité gagnent le pays, et c'est dans l'urgence qu'elle doit quitter le Libéria, laissant derrière elle mari et enfants.

Évocation passionnante d'une turbulente période de l'histoire des Etats-Unis comme du destin d'un pays méconnu, le Libéria, le roman de Russell Banks tire sa force exceptionnelle de la complexité de son héroïne, et d'un bouleversant affrontement entre histoire et fiction. Petite enfant gâtée de l'Amérique rattrapée par la mauvaise conscience en même temps qu'universelle incarnation de toute quête d'identité en ses tours et détours, mensonges et aveux, erreurs et repentirs.
Sur cette trame, Russel Banks dresse un superbe portrait de femme, la sombre peinture d'un Libéria promis à un bel avenir mais aujourd'hui rongé par la violence et le désespoir.


un livre remarquable
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