Voilà une tragédie au titre provocateur que j'hésiterais à mentionner à un musulman de crainte que cette lecture ne le peine inutilement : non seulement Mahomet y est représenté, mais il est est dépeint comme un hypocrite, un vrai tartuffe concupiscent et cruel, dont le seul mobile est le pouvoir, Dieu n'étant qu'un alibi.
En réalité, et Benoît XIV l'avait parfaitement perçu à l'époque, c'est l'église catholique qui est visée, église n'hésitant pas à fanatiser des jeunes gens dont elle fera des criminels. Dans le genre régicide, puisque Séide, un esclave de Mahomet, devra tuer Zopire (sans savoir que ce dernier est son père), on pense aussitôt à Ravaillac.
Voltaire n'utilise donc la figure de Mahomet que comme la couverture orientaliste qu'il a déjà utilisée dans Zadig, ou comme Montesquieu l'avait fait avec les lettres persanes, pour attaquer ce qu'il connaît mieux, et il est visible que l'islam n'est à ses yeux ni pire ni meilleure religion que les autres : aucun élément du dogme musulman n'est précisément nommé ni attaqué. Toute religion recherchant un pouvoir temporel pourra se reconnaître dans le Mahomet de la pièce.
Sur la qualité littéraire, je suis un peu déçue : la pièce peine à démarrer, on retrouve le vocabulaire et les effets, non renouvelés, de Racine, sans le souffle, et les personnages, sauf au moment du crime (là, on retient son souffle), semblent sortis d'un spectacle de marionnettes.
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