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[8-12 ans][Papa-Longues-Jambes | Jean Webster]
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Swann




Sexe: Sexe: Féminin
Inscrit le: 19 Juin 2006
Messages: 2656


Posté: Mer 16 Avr 2025 15:46
MessageSujet du message: [8-12 ans][Papa-Longues-Jambes | Jean Webster]
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A mes débuts d'enseignante, une collégienne m'avait dit qu'elle aimait Papa-Longues-Jambes, parce que l'histoire la faisait rêver ; le résumé qu'elle m'en avait fait ressemblait à celui de Candy, un dessin animé de Yumiko Igarashi et de Kyoko Mizuki à la fin des années 70, début 80, que je regardais, entre autres, en revenant de l'école. Les similitudes structurelles sautent aux yeux : une orpheline dans un institut caritatif, une adoption mystérieuse, par un certain John Smith (ou par un certain Oncle André, pour Candy), patriarche craint mais que l'orpheline côtoie à son insu plusieurs fois... et je n'en suis qu'au début. Donc Jerusha Abbot dite Judy, écrit à son bienfaiteur, qui veut lui rester inconnu, et dont elle ne connaît que la silhouette aux longues jambes. Il lui offre des études supérieures et de quoi vivre au quotidien, à condition qu'elle devienne écrivain (ses qualités stylistiques l'avaient frappé lors d'une lecture à l'orphelinat). Sa deuxième condition est qu'elle lui écrive une fois par mois et qu'elle n'attende pas de réponse ; des précisions pourraient lui être apportées par un secrétaire, mais jamais directement. Nous avons donc affaire à un roman épistolaire où les lettres du fameux secrétaire seront évoquées par Judy, mais jamais transcrites.
Mon édition s'adresse évidemment à des enfants non francophones : les notes de vocabulaire sont tellement simples - pour une francophone rompue aux racines latines - et jamais sur des termes quotidiens qui me manqueraient davantage, que je mesure à quelle point ma facilité à lire ce roman ne tient pas du tout à mes aptitudes d'angliciste...
L'enthousiasme, avec quelques passages à vide, la sincérité, le désir d'affection, l'humour, la curiosité intellectuelle et quelques remarques naïves mais très recevables que Judy fait sur sa nouvelle vie et les matières, la littérature, provoquent ma sympathie et je finis par comprendre à quelques signes que son destinataire est également sous le charme. Les pages se tournent sans effort.
Un certain malaise a fini par me saisir : j'ai trouvé tout de même fort de café le silence qu'il oppose sans cesse à Judy. Elle voudrait l'imaginer et lui demande plusieurs fois un signe, quitte à ce que ça ne soit pas lui qui le lui écrive. Le refus d'entrer en relation, puisque Judy devrait pouvoir se contenter d'être financée, a tout de même quelque chose d'inégalitaire : Judy est censée, elle, lui donner des tranches de vie, fussent-elles uniquement focalisées sur le récit de ses études. Il refuse de la laisser aller en vacances dans une famille où elle risquerait de sympathiser avec un jeune homme ; il refuse qu'elle accepte une bourse que son excellence décroche afin de ne plus rien lui devoir plus tôt que prévu... Beaucoup de signes que des psychologues d'aujourd'hui, ou des féministes, trouveraient alarmants ! Les lecteurs de Sade ou de Marivaux avertis de la fin, verraient dans le double jeu de son correspondant-connaissance occasionnelle recueillant des confidences utiles pour la manipuler, l'entrée dans une relation de domination. Il est question tout le temps d'argent, en numéraire comme en nature ; certes, Judy fait tout pour se dépêtrer de cette dette qu'elle a envers son "Daddy" si bien que ses insolites cris d'affection dans le vide peuvent émouvoir et garantir une belle âme désintéressée - tout en nous demandant bien ce qu'elle trouve à ce destinataire mutique en dehors de sa générosité et de ses dons très à-propos qui en font la marraine de Cendrillon plus d'une fois. Jean Webster, je le crois, était persuadée que cela suffisait à rendre leur égalité à Judy et à son (sugar) Daddy.
La fin était prévisible, Judy finit ses études en jeune femme accomplie (je ne donne pas les détails) hommage aux progrès des femmes pauvres (subventionnées par les bourgeois) donc happy end très patriarcal, patronizing même, à vous donner froid dans le dos avec le regard du XXIème siècle, mais sympathique, à remettre dans le contexte du début du XXème siècle, c'était sans doute vu comme le beurre et l'argent du beurre, je souriais niaisement. Après tout, Judy semble au comble de la joie et au fond, c'est bien de l'émancipation pour une jeune fille à qui Jane Eyre semblait un alter ego... Rafraîchissant au milieu de tant de lectures de classiques !

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