La pensée fleurie.
Tombé dans "Le grand fossé" encore jeune, j'ai bu une potion amère en découvrant Uderzo au dessin, toujours impeccable mais au scénario définitivement imbuvable. Depuis, les albums ont défilé comme à la parade, froufrous virevoltant devant et habits miteux derrière mais cette lecture n'était plus pour moi. Il a fallu l'arrivée de Fabcaro pour changer la donne. Si ses jeux de mots sont souvent fastidieux et plusieurs scènes mal exploitées à l'exemple du TGV pour Lutèce, des trottinettes ou de la nouvelle cuisine quand le scénariste s'attelle à ce qui l'intéresse, le mal-être contemporain, la crise du couple, les bonimenteurs égocentrés, il touche et métamorphose des personnages stéréotypés, vains et répétitifs en êtres vivants et uniques. Les grosses baffes semblent faire mal à nouveau grâce à une pensée positive sensée masquer les peurs et les douleurs. Vicévertus, le médecin-chef des armées romaines, envoyé en Armorique pour amollir le Gaulois récalcitrant par le biais d'un discours lénifiant, niaiseux et faussement valorisant est un manipulateur narcissique de la plus belle eau. Lorsque Astérix, fin psychologue, le prend à son propre piège, Vicévertus dévoile sa face cramoisie et même la chaume du toit derrière Astérix paraît souligner la majesté hiératique des bacchantes tombantes. le pervers romain va se rabattre sur Bonnemine, la séduire, la soustraire de son milieu et lui faire miroiter les lumières de Lutèce. Vicévertus n'a pas vraiment pris en compte la force de l'inertie car Bonnemine, au bout du compte, aura les boules et voudra retrouver son Cochonnet pour que le jeu perdure, ad vitam aeternam. le dessin de Didier Conrad réussit la gageure de se couler dans le style d'Uderzo tout en restant personnel. Fabcaro redonne de la consistance à toute la galerie de personnages statufiés. Finalement la lecture du dernier Astérix est une bonne surprise.

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