Un gorille dans le moteur.
Le Marine Samantha Locklear a été rapatriée d’Irak, pleine de confusion et gangrenée de culpabilité après avoir été soufflée par deux explosions et torturée quotidiennement une année entière par les opposants aux Américains. Réfugiée depuis dans une casse automobile posée dans le désert du Nevada, Sam désosse des épaves, récupère des pièces mécaniques avec l’aide de Mike, un gorille peu loquace mais prompt à donner des conseils avisés à Samantha, même quand elle ne le sollicite pas. Le gorille peut paraître désemparé quand Sam sombre dans ses hallucinations, ses vertiges et ses cauchemars. Une nuit, surgit une soucoupe volante en détresse avec à son bord deux petits êtres à l’allure sympathique mais aux ombres portées inquiétantes. Walden, un scientifique peu regardant sur les méthodes, secondé par une troupe de mercenaires, décide de s’installer à proximité de la casse automobile, ayant eu vent de manifestations extraterrestres. Secondé par deux hommes à tout faire incapables, Walden cherche à faire fuir Samantha mais il ignore de quel bois l’ancienne Marine peut se chauffer.
Mieux vaut aborder la dernière œuvre singulière de Terry Moore avec une bienveillante ignorance parce que les dix chapitres du recueil vont dévoiler l’histoire de Samantha avec délicatesse et creuser les zones d’ombre qui éclairciront à mesure son comportement actuel. Par exemple, on saura pourquoi le gorille se prénomme Mike et pourquoi l’extraterrestre fait Bik. Malgré un passé délétère, l’histoire actuelle se lit avec délectation. Les dialogues et les situations sont souvent drôles, en totale concordance avec le trait précis et expressif de l’artiste indépendant. Dans les flashbacks, le graphisme semble s’effilocher, cernant avec peine une réalité âpre qui se dérobe. Les citations en exergue aux chapitres sont souvent un régal. Terry Moore sait magnifiquement orchestrer ses histoires en amenant ses personnages tout au bord de leurs failles et en continuant à les soutenir malgré l’aimantation des gouffres.

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