Ce livre, que j'ai lu d'emblée comme une pièce de théâtre, se compose des propos rapportés par le narrateur (très rarement en discours direct mais sans guillemets) entre « la jeune fille des nuits payées », nue sur des draps blancs, nommée Elle et détentrice du savoir, et l'homme atteint de « la maladie de la mort », désigné comme Vous.
Il est une magistrale illustration de deux principes fondamentaux de notre pensée contemporaine (psychanalytique ? philosophique ?) : que la relation sexuelle n'existe pas (Lacan) – car il ne s'agit pas de relation ; que l'incapacité d'aimer, condition pathologique, coïncide avec la mort.
Tout est dit. Magistralement.
Cit :
« Elle vous demande si elle vous est utile pour faire votre corps moins seul. Vous dites que vous ne savez pas bien comprendre ce mot lorsqu'il désigne votre état. Que vous en êtes à confondre entre croire être seul et au contraire devenir seul, vous ajoutez : Comme avec vous. » (pp. 12-13)
« Vous lui demandez : En quoi la maladie de la mort est-elle mortelle ? Elle répond : En ceci que celui qui en est atteint ne sait pas qu'il est porteur d'elle, de la mort. Et en ceci aussi qu'il serait mort sans vie au préalable à laquelle mourir, sans connaissance aucune de mourir à aucune vie. » (p. 24)
« Vous lui demandez comment le sentiment d'aimer pourrait survenir. Elle vous répond : Peut-être d'une faille soudaine dans la logique de l'univers. Elle dit : Par exemple d'une erreur. Elle dit : jamais d'un vouloir. Vous demandez : Le sentiment d'aimer pourrait-il survenir d'autres choses encore ? Vous la suppliez de dire. Elle dit : De tout, d'un vol d'oiseau de nuit, d'un sommeil, de l'approche de la mort, d'un mot, d'un crime, de soi, de soi-même, soudain sans savoir comment. » (p. 52)
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