[Walking Dead. T. 18, Lucille | Robert Kirkman ; Charlie Adlard]
Negan et Carl vont en bateau. Carl sort son petit couteau. Qu’est-ce qui reste ? Telle est la question posée par le dernier opus de Robert Kirkman que la couverture choisie par l’éditeur français Delcourt entretient en point de suspension comme des esses de boucher. On y voit le chapeau de Carl au sol, en premier plan et derrière, Negan, triomphant, face à un Rick, visiblement abattu. Cela s’avère bien réel durant un laps de temps mais c’est sans compter sur le mouvement de la vie avec ses abîmes à l’affût, ses spirales absurdes et surtout les conduites imprévisibles des hommes.
Depuis que Negan, leader du gang des Sauveurs, s’est imposé d’une main de maître (sur une batte de baise-boule) auprès de Rick et de son groupe, les affaires vont de mal en pis pour Rick, shérif déchu dont l’étoile pâli aussi vertement qu’une frimousse de zombie. Rick courbe l’échine et accepte de partager pour moitié avec Negan les vivres, médicaments et autres fournitures tels des matelas. Andréa, son amoureuse déçue, se détourne de lui ; Carl, son fils éborgné, fugue, « fulgur » au poing. Rick a pourtant son plan mais il souhaite que rien ne filtre par inadvertance. Negan ne doit rien savoir et continuer ses fanfaronnades macabres. Seul Jésus est parti en éclaireur afin de localiser l’antre de Negan puis de jauger les forces de l’adversaire mais l’atout de Rick tombe dans les pattes des Sauveurs, assez peu tendres avec Jésus. Carl, dissimulé dans les matelas et rendu sur place, massacrent une poignée de Sauveurs mais Negan en sort indemne. Il s’empare du moutard qui lui est monté au nez. Sa colère froide, ses violences primesautières, sa folie insaisissable le rendent particulièrement dangereux, totalement imprévisible. Est-il capable de pardon, de mansuétude ? Est-il joueur, manipulateur, jouisseur ? Il est tout cela à la fois et par le fait il acquiert une dimension inégalée de méchant patenté. Rick Grimes fait bien pâle figure à côté. Pourtant, un Sauveur, repassé au fer puis à l’ennemi, pourrait bien donner du grain à moudre et du fil à retordre à la « tête de con » de Negan. La vengeance d’un cocu peut être fatale mais seul l’avenir le dira dans un prochain numéro.
Moins éprouvant que le précédent recueil, « Lucille » temporise, plante le croc dans le décor et malgré des montées d’adrénaline, joue dans l’œil du cyclone. La tempête sera dans le prochain volet, branlant, férocement. Avec le glissement des rôles orchestré par le diabolique scénariste, Il est probable alors que d’autres personnages « historiques » en prennent pour leur grade et rejoignent le peloton des macchabées en marche. Pour prévoir la fin de la fin, il faudrait savoir si les auteurs suivent un fil conducteur depuis le début ou bien réagissent à l’instinct à mesure que les aventures s’échafaudent et s’empilent. Le suspense est relancé et la série conserve une aura mortifère prenante.
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