ndreï Makine égrène le temps d’un livre ces rencontres qui ont forgé son enfance et sa jeunesse, des femmes parfois juste entrevues mais qui lui ont a apporté des « paradis fugaces », des «instants d’amour ». Le mot pour l’écrivain n’est pas exagéré dans la mesure où, placée sur l’échelle du temps, notre vie est brève de toute façon, aussi, ces rencontres furtives sont-elles peu de choses et éternelles à la fois puisqu’elles ont été. Chaque femme évoquée est mise en relation avec le contexte historique soviétique de la fin des années 60 jusqu’aux années 80. Dans sa jeunesse, le narrateur a voulu croire lui aussi à l’avènement prochain de la cité idéale inlassablement promise par le parti. Ses certitudes seront ébranlées par des petits événements et
notamment par ces rencontres... Adolescent, une jeune fille le convainc finalement que « la seule doctrine vraie (...) tient au fait de s’aimer ». Aussi, adulte, ayant perdu ses illusions, il comprend que les petits enchantements du quotidien (liés souvent à la nature) sont autant de résistances face au régime. Le récit de Makine ne s’inscrit pas dans l’Histoire qu’il laisse aux historiens, mais dans les histoires, ces petites résistances qui en apparence ne « comptent pas ». Makine n’est pas vraiment un optimiste face à l’avenir de l’homme (indépendamment du régime sous lequel il vit), néanmoins, il sait reconnaître des « instants » qui apportent du sens à nos vies et peuvent contrebalancer le reste. Les personnes qu’il fait revivre pour nous et surtout Jorka, l’un des rares hommes évoqués, sont émouvantes, ce sont des êtres entiers, souvent blessés, qui ne tergiversent pas. Enfin, l’écriture de Makine est pour nous, justement l’un de ces enchantements dont il faut se saisir, sobre et lumineuse.
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