[Tex. Spécial n° 17, Marchands d'esclaves | Gianluigi Bonelli ; Aurelio Galleppini]
Dans la mine aurifère de la Barranca de Cerro Aguire qu’un canyon dissimule, le cupide Don Obregon utilise des esclaves, hommes et enfants, jusqu’à ce que mort s’ensuive. Le sinistre et cynique personnage a corrompu nombre de notables, shérifs et membres du gouvernement. Ses appuis sont solides et ses sbires déterminés, du méphitique Torres au redoutable Pablo Mendez. Tex Willer et Kit Carson sont mis sur la piste des voleurs d’enfants par le père Mateo dirigeant la mission de San Juan. Le fils métis d’A-Tu-Nah, femme navajo résidant à la mission, a été enlevé par l’ignoble Mendez aidé d’un acolyte des basses œuvres. Tex, appelé Aigle de la nuit par les Navajos, promet de ramener l’enfant sain et sauf mais la partie qui se joue est rude. Difficile de faire les choses loyalement quand les rurales et les gendarmes sont de mèche avec le tortionnaire exploiteur Don Obregon dont le faciès et l’allure générale évoquent sans équivoque le chimpanzé. Tex et Kit vont tâter de la prison mexicaine, échapper de justesse à une embuscade nocturne et à une souricière, esquiver encore les menottes des gendarmes grâce à l’intervention opportune du journaliste Jacinto Moncado, infiltrer la mine fortifiée et déclencher une rébellion à coup de dynamite.
L’histoire composée par Claudio Nizzi avance sur un tempo soutenu. La lente remontée jusqu’à Obregon est savamment orchestrée sur une piste semée d’embûches. Chaque sous-fifre que les rangers abattent est en soi un gros calibre. La palette des bassesses humaines est riche et nuancée, du teigneux au couard, du sadique au cynique. Lorsque Torres s’inquiète face à son patron Don Obregon qu’il fasse visiter la mine à des investisseurs américains, ce dernier lui rétorque : « Sois tranquille, les hommes d’affaires sont partout les mêmes. Américains ou Mexicains, faire fructifier leur argent est la seule chose qui les intéresse et si le gain d’un investissement est élevé, ils se fichent bien de savoir de quelle manière il a été réalisé ». Simple et pertinent ! Toutefois, le Tex Spécial n° 17 vaut aussi pour le dessin du talentueux espagnol Manfred Sommer. Il est difficile de détacher une image tant la narration est fluide et cohérente mais le graphisme est éclatant. Peut-être les scènes de pénombre ont-elles encore plus de classe à l’exemple de celle où Tex et Kit sortent du couvent de femmes (p. 158), assombris après leur entretien avec le père Eliseo ? La densité des aplats noirs, la finesse et la précision du trait confèrent à l’ensemble une clarté de lecture et une délectation de tous les instants. Manfred Sommer est un artiste majeur de la bédé hispanique. Son décès en 2007 a plombé Tex et consorts en particulier et le monde du 9e art en général.
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