Nous sommes en 1974, dans la région de Leeds. Noël approche. Après Jeanette Garland et Susan Ridyard, la jeune Clare Kemplay vient de disparaître sur le chemin de l'école. Son cadavre sera bientôt retrouvé dans une tranchée, sur un chantier. Edward Dunford, reporter à l'Evening Post, est encore un néophyte qui fait ses premières armes dans l'ombre du journaliste vedette de la rédaction, Jack Whitehead. Mais ni le choc lié à la mort de son père, ni les coups bas de ce sale con de Jack Whitehead ne mettront à mal sa détermination : écrire enfin un article-scoop, un de ceux qui le propulseront à la une du journal, un de ceux qui lanceront sa carrière ! Alors, au volant de la vieille voiture de son père, il sillonne les routes de l'Ouest du Yorkshire à la recherche d'indices susceptibles d'éclairer les meurtres de ces trois fillettes. Au début, il croit seulement chasser le scoop, mais plus il enquête, plus il découvre que bien des choses sont pourries au royaume d'Angleterre : crimes sordides, policiers corrompus, entrepreneurs véreux, élus complices... L'enquête d'Eddie va le conduire à une véritable descente aux enfers.
1974 est le premier volet d'une tétralogie, le
Quatuor du Yorkshire (
1974,
1977,
1980 et
1983), que David Peace a consacré au crime et au Yorkshire et qui met en fiction des faits divers réels tout en brossant le portrait de l'Angleterre de 1974 à 1983. Une Angleterre lessivée par la crise économique, dans des années de régression sociale et culturelle, les années de la révolution conservatrice thatchérienne.
Véritable portrait social d'une Angleterre en pleine décadence,
1974 est un roman d'une extrême noirceur, qui nous emmène dans les bas-fonds de l'humanité, avec un réalisme cru et désespéré. Le style d'écriture, très particulier, incisif, nerveux, fait de phrases syncopées, ajouté à la brutalité des mots et des propos, s'il illustre bien les névroses du héros et la désespérance ambiante, peut aussi parfois dérouter le lecteur, de même que certaines scènes particulièrement violentes peuvent susciter la répulsion, voire le dégoût. Toutefois, c'est le chaos que Peace veut montrer, par ce récit hallucinatoire d'une descente aux enfers qui se terminera tragiquement, et il y réussit à la perfection, laissant son lecteur "sonné" par ce texte (un peu trop) noir et violent.
le cri du lézard