[La Hulotte. 94, Le journal de la Reine des frelons : le château de ma Mère | Pierre Déom]
Le printemps est revenu. Je suis toujours vivant et la nouvelle
Hulotte est née. L’« irrégulomadaire » pulse, pousse et s’accorde aux rythmes des saisons deux fois par an.
Le journal de la reine des frelons s’ouvre au 2e chapitre et fait suite au n° 92. Entre les deux,
Tonton Griffon a poussé du bec pour s’immiscer. La reine reprend du service et pond sans relâche dans son château en carton. Les ouvrières bossent sans répit nuit et jour. Polyvalentes, elles maçonnent mais elles chassent si les circonstances l’exigent. Les proies sont tuées, découpées, malaxées puis portées au nid : taons, mantes, libellules, chenilles, grillons, criquets, punaises, papillons, araignées, mouches, guêpes, abeilles, voire sauterelles et lézards juvéniles, tout est bon pour le frelon. Seul le bourdon blindé, gros « nounours » velu, semble lui résister. Le « faucon des insectes » chasse à vue et fond sur ses proies quand elles ont la tête ailleurs, dans une fleur, par exemple. Le frelon ne se sert pas de son dard mais de ses mâchoires acérées pour trouer le dos de sa victime coincée entre ses pattes. La viande gorgée de protéines est à destination quasi exclusive des larves affamées. En échange, la salive de la larve, une simple goutte, « sirop délicieux, sucré et riche en acides aminés » régale les frelons adultes. Afin de palier les écarts de température et maintenir une atmosphère idéale dans la frelonnière, les ouvrières regroupées font vibrer leurs muscles pour produire la chaleur nécessaire aux larves ou alors elles battent des ailes en guise de ventilateurs pour rafraîchir l’air. Si la température est trop élevée, les frelons absorbent de l’eau dans les environs puis la répandent en gouttelettes sur le nid. La ventilation produit l’évaporation et un rafraîchissement salutaire.
Le journal tenu par la reine mère des frelons est tout vibrant de vie. Les anecdotes pullulent et composent l’ordinaire somme toute étonnant d’un nid de frelons, de sa conception à son aboutissement. S’intercale entre les propos de la diariste royale « Le grain de sel du Pr Martagon » apportant un éclairage scientifique extérieur. Le tout compose un plaidoyer efficace contre la mauvaise réputation de l’insecte. Pierre Déom revient sur quelques idées reçues concernant notamment le dard de la grosse guêpe rousse et jaune à corselet noir dont le venin n’est pas plus dangereux que celui des guêpes ou des abeilles. La mauvaise réputation vient davantage de « l’assez forte douleur » que la piqûre occasionne. L’homme orchestre de La Hulotte manie la plume avec finesse, du texte à l’image et inversement. L’humour et la rigueur scientifique se marient à merveille. Le bénédictin de Boult-aux-bois distille avec grand soin dans son athanor ardennais un composé subtil qui trouvera place dans son grand œuvre en train de se faire. Un 3e chapitre du Journal de la Reine des frelons est prévu pour le second semestre 2010. Intitulé « Les derniers jours de la classe ouvrière », il viendra clore la collection 9 de l’encyclopédie des bois et des champs, constituée des n° 86 à 95, soit cinq années de labeur et de magie incarnés.
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