Le Triangle 9 pose les jalons de la saga Teddy Ted, cow boy playboy, garçon vacher à la mèche rebelle, beau et bon dans tous les angles et sous toutes les coutures. Le domaine du Triangle 9 est convoité par le riche propriétaire terrien et shérif de Tombstone, Hartz, véritable père fouettard. D’ailleurs, avec sa lanière maniée en maître, il fera subir un effeuillage au beau Teddy par lacération de ses vêtements : un moment hard et cul-culte. Malgré les revers subis par le méchant Hartz tout au long des soixante-cinq planches, son admiration pour Teddy Ted ne faillira pas ou peu. Il y a une galerie de personnages à découvrir : le jeune Bronxy, fils du proprio défunt et combatif en diable à qui Teddy Ted va venir spontanément en aide ; le géant férox et Rouky, bagarreur quand on le cherche mais animé des meilleures intentions pour Bronxy et Teddy ; le musicien mexicain Sancho, un peu naïf mais courageux, poussant la ritournelle à la guitare et sachant dénicher les vrais potes, Bronxy, Teddy et Rouky. Les nervis de Hartz, lieutenants à la solde, souvent rabaissés par ce dernier, suivent Hartz enfer et contre tout.
L’aventure concoctée par Roger Lécureux (1925-1999) en 1964 pour le journal Vaillant, puis pour Pif gadget ensuite jusqu’en 1975 (121 récits en noir & blanc) se laisse encore agréablement lire aujourd’hui. L’histoire n’est pas outrée même si les bons sentiments dégoulinent aux entournures. Les bienveillants s’en sortent et les méchants coulent à pic. La morale est sauve. Le dessin de Gérald Forton est parfois trop statique, tout engoncé dans des poses figées mais il est parfois séduisant dans la cambrure d’un cheval, les hachures d’un paysage, les ombres portées d’un visage. Le recueil des éditions bruxelloises Hibou ne rend pas complètement justice à l’imprimerie des années soixante et au papier pulp du journal communiste. Lire Teddy Ted dans son édition princeps a un goût autrement savoureux, une odeur d’encre entêtante, un grammage de papier particulier. Paraissant chaque semaine en quelques planches parcimonieuses, les aventures du cow boy aux yeux clairs et les silences de l’Apache instillaient une présence amicale dans les blancs de l’absence.
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