Dans un monde proche du notre mais aux vagues allures futuristes, une jeune femme se métamorphose peu à peu en truie. Sous la forme d'un monologue, elle relate son histoire : elle décrit les premiers symptômes de sa mutation physique (sa chair qui s'arrondit et rosit jusqu'à la poussée de mamelles) et psychique (son aversion soudaine pour la charcuterie) tout en racontant aussi son quotidien totalement bouleversé par sa transformation bien difficile à gérer ! Un roman qui se veut à la fois conte fantastique licencieux et satire sociale : de grandes prétentions donc pour un récit que j'ai trouvé au final assez pénible.
Tout d'abord la narratrice est d'une naïveté (pour ne pas dire d'une bêtise) exaspérante : employée comme "démonstratrice-masseuse" dans une parfumerie, elle ne se rend pas compte qu'en fait elle y est prostituée. Puis, ballotée d'homme en homme au grès des événements, elle reste totalement passive, comme dépourvue de volonté propre. Et si sa métamorphose en truie est censée symboliser son émancipation, sa transformation devant l'amener à penser par elle-même pour la première fois, au final elle reste toutefois complaisamment sotte. Quant au style, sur le mode "réaliste" de l'oralité, il s'avère d'une pauvreté déplorante, alors même que la narratrice-truie est censée apprendre au fur et à mesure de sa métamorphose.
Les personnages secondaires sont tout aussi caricaturaux, particulièrement les hommes, tous décrits comme en quête permanente d'argent, de reconnaissance, de pouvoir et tous asservissant les femmes (Honoré, le directeur de la parfumerie, le Président, le marabout) considérées comme de simples objets de plaisir. Et le récit se poursuit ainsi, de clichés en clichés. Par exemple, notre truie évoque bien évidemment saleté et puanteur et s'oppose donc, a priori, au monde beau, élégant et haut de gamme de la parfumerie. Mais bien sûr on réalise bien vite en lisant ce livre que finalement ce milieu-là est totalement factice, cachant derrière de jolis atours hypocrisie, vice et malveillance.
La seconde moitié du roman dérive quant à elle vers une dimension politique inaboutie : immigration, censure, répression, ministère des "bonnes mœurs", tout y est et tout y est survolé ! Et la succession de rebondissements, de course-poursuite, de captures et d'évasion qui se déchaine dans cette seconde moitié du livre s'avère vite lassante.
S'il se veut riche en messages, ce roman n'avance finalement rien de réellement nouveau. Un roman ambitieux donc, mais qui manque cruellement de subtilité : à trop forcer le trait, le message perd de son efficacité.
le cri du lézard