Ma première rencontre avec Pierre Michon.
Comme intimidée par tant d'intelligence, par cette écriture "flamboyante et laconique" ai-je lu quelque part et je suis d'accord, par ce verbe qui magnifie tout ce qu'il évoque.
Pierre Michon nous parle d'un tableau "Le Grand Comité de l'An II siégeant dans le pavillon de l'Egalité, comme (il) devait originellement s'appeler" et de son auteur François-Elie Corentin. Il nous parle de l'Histoire, des hommes dans l'Histoire, de la Révolution, de la Terreur mais aussi de la peinture et des lectures que l'on peut en faire. Il convoque Tiepolo et le Caravage et aussi Michelet. Et au travers de tout cela, il explore magistralement la complexité et l'ambivalence de l'homme.
Une lecture magique et envoûtante.
"Car il était à peine sorti des jupes de sa mère - si tant est qu'il en fût sorti. Il en était encore imprégné, de leur douceur, de leur étoffe : comme tissé des mailles de ses jupes. Elles lui donnaienr cohérence, volonté et certitude, goût des femmes et de soi-même, elles lui faisaient ce corps de blondeur rêveuse qu'on voit sur le plafond à la figure du page, et qui certes est un type qui vient de Veronese, pas un portrait, pas son portrait, mais à quoi tout de même je suis sûr qu'il ressemblait. Il est au comble du bonheur, là-haut, sur le plafond invariable : il est dans les jupes de sa mère...Oui, il était fait de la maille de ces jupes; et quand la maille se mit à filer, tout suivit, la beauté, la volonté et la confiance, le goût de la femme, ce monde : il devint l'autre, le frère jumeau du cordonnier Simon.
Ainsi les hommes filent : et si les hommes étaient fait d'étoffe indémaillable, nous ne raconterions pas d'histoires, n'est-ce-pas ?" page 22 au sujet de François-Elie Corentin jeune apprenti de Tiepolo.
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