Les deux premiers chapitres m'ont entousiasmée : le livre étudie la façon dont différentes branches de l'espèce humaine ont évolué en fonction de leur environnement, ou co-évolué avec celui-ci, depuis un passé relativement récent (de l'ordre de 10 000 ans). Ainsi on observe beaucoup moins de cas d'intolérance au lactose en Europe et dans d'autres régions du monde où le lait de vache fait partie de l'alimentation traditionnelle que dans des régions d'Asie où il n'en fait pas partie : les populations qui ont commencé à consommer le lait de vache ont naturellement favorisé les individus capables de l'assimiler, et ceux-ci ont eu tendance à en consommer, alors que pour les populations qui ne consomment pas de lait rien n'est venu influencer la tolérance des individus au lactose.
Autre exemple qui m'a beaucoup plu, sur la médecine (le livre fourmille d'exemples intéressants en tous genres) : en Europe, un taux de fer dans le sang inférieur à une certaine valeur indique une anémie, qu'il faut combattre en augmentant le fer dans l'alimentation. Cependant, il semble qu'un taux élevé de fer dans le sang puisse contribuer au développement d'infections, et que faire baisser ce taux puisse être une méthode de l'organisme pour lutter contre les infections. En Afrique, des médecins ont augmenté la quantité de fer dans l'alimentation d'un groupe de Masaï, qui semblaient anémiés selon les critères occidentaux. Résultat : les individus qui ont eu un complément de fer ont été sensiblement _plus_ sujets à des infections que les autres...
Le chapitre suivant m'a laissé beaucoup plus dubitative, avec des affirmations qui me semblaient plus être des choses de "notoriété publique" que des choses démontrées scientifiquement, et après ç'a été la Berezina : l'auteur traite des différences entre hommes et femmes avec des arguments qui me mettent un peu mal à l'aise, et c'est le coup de grâce quand il parle du cerveau. D'après lui, tous les scientifiques sont d'accord pour dire que les différences entre cerveaux masculins et féminins sont nettes, et que cela se traduit sans aucune ambiguïté sur les capacités cognitives : les hommes et les femmes ne maîtrisent pas de la même manière le langage, l'orientation, et tout un lot d'autres facultés, et cela pour des raisons pûrement biologiques.
Or, il est tout simplement _faux_ que tous les scientifiques soient d'accord là-dessus (voir par exemple les excellents travaux de Catherine Vidal, qui a écrit au moins un très bon livre de vulgarisation :
Cerveau, sexe et pouvoir, en collaboration avec Dorothée Benoit-Browaeys). Que l'auteur soit d'accord avec un courant et pas l'autre, c'est son droit le plus strict, mais faire comme si l'autre courant n'existait pas (aucun travail n'allant contre ce qu'il dit n'est cité), c'est tout simplement malhonnête. Du coup cela jette un discrédit sur l'ensemble du livre.
La suite du livre ne vaut pas mieux et enchaîne beaucoup plus d'a priori que de réflexions scientifiques, et ce livre qui s'avérait passionnant semble au final être plus une fumisterie qu'autre chose.
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