Cela ressemble à une histoire vraie. Ça tombe bien, c'est une histoire vraie. Enfin, à peu près, puisqu'il s'agit du portrait doux-amer du narrateur et en partie aussi de l'auteur, Nan Aurousseau, ex-taulard, plombier, chauffagiste et maçon, qui signe ici son premier roman.
Dans
Bleu de chauffe le patron s'appelle Dolto et dirige son entreprise de plomberie avec pour seul objectif de s'en mettre plein les poches. Essorage des salariés, lessivage des sous-traitants, matraquage des clients : c'est magouilles et compagnie à tous les étages. Sauf que Dan, son employé et narrateur de l'histoire, n'est pas dupe et n'en peut plus des malfaçons et entourloupes du patron. Or Dan est un malin qui est passé par la case prison, qui a un sens aigu de l'observation prolongé par un bon téléobjectif, et qui monte en pression au fil des pages : le pétage de plombs n'est pas loin...
«Mon patron s'appelle Dolto. C'est un petit homme suave d'une quarantaine d'années assez rond à l'extérieur mais géométriquement pourri et sans pitié à l'intérieur. Aidé par trois garçons baraqués, il vient de déménager le coffre-fort de l'entreprise. Le coffre-fort de son entreprise. Et cela de nuit, un mardi, alors qu'il était censé être en vacances. J'ai pris des photos.
Le coffre a été embarqué dans une camionnette blanche que j'ai photographiée aussi. Il se croit malin Dolto, mais avec moi il a tout faux, il est tombé sur un os, un os de Mamout. Mamout c'est mon nom, moi je ne descends pas du singe comme je dis toujours.
Avec ses lunettes à double foyer Dolto vous regarde toujours par en dessous et quand il vous parle on dirait qu'il vous suce. Mais il s'agit juste d'une impression parce qu'en réalité il est en train de vous enculer et ça, vous ne le sentez pas. Vous avez mal après. Mais après il est trop tard […]»
Evidemment, dès les premières lignes, un tel style interpelle ! Un ton singulier, une énergie palpable, une voix immédiatement perceptible, la rugosité du propos, le langage gouailleur, la critique sociale sous-jacente : on pourrait penser la partie gagnée. Sauf que moi j'ai trouvé tout cela assez laborieux, agaçant à la longue et même quelque peu caricatural. Pour une trouvaille d'écriture étincelante (
«on est jamais mieux asservi que par soi-même»), trop d'autres sont franchement plombantes pour convaincre (
«Me mentir à moi-même comme un arracheur de vent»). Quant à la pirouette finale, et bien, elle fait flop.
le cri du lézard
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