[Le casse. T. 5, Gold Rush | Luca Blengino ; Antonio Sarchione]

Si la vengeance est un plat qui se mange froid, dans le Yukon, il se savoure congelé. Dans les territoires du Nord-Ouest canadien, la ruée vers l’or du Klondike attira des milliers de prospecteurs. Des villes s’érigèrent et le sang coula. Celle de Cripple’s Junction est tenue d’une main de fer vicieuse par son fondateur, Sebastian Zondrick, ex colonel yankee aux méthodes expéditives. Hermès Coltrane refusant d’obéir aux ordres meurtriers de Zondrick préféra déserter l’armée nordiste. Rattrapé, il dut supporter l’ignominie de son supérieur et son sadisme débridé. Aujourd’hui devenu prestidigitateur et homme de spectacle itinérant, ancien braqueur de trains, il reste hanté des cauchemars nourris du passé. Il pourrait avoir une bonne raison de faire la peau à Zondrick d’autant que ce dernier a mis la main sur une pépite d’or monstrueuse assurée pour cinq millions de dollars. D’abord incongrue, l’idée d’un casse invraisemblable prend tournure avec l’arrivée d’un ami évadé du pénitencier californien de San Quentin, Zachary McMahon. Il ne reste plus qu’à convaincre un Indien métis, tireur d’élite, à retrouver le concepteur du coffre-fort inviolable, à s’associer à un artificier hors pair, à s’approcher de la femme de Zondrick, à détourner la vigilance de Van Hooger de l’agence Pinkerton, à contourner tous les sbires à la solde du maître des lieux, un diable omniscient et omniprésent. L’affaire est loin d’être dans le sac d’autant que les traîtrises sont légion, chacun jouant sa partition en solo selon des motivations complexes.
L’album de 64 planches est une histoire complète maîtrisée de bout en bout par un scénariste doué, un dessinateur inspiré et un coloriste au diapason. La narration est fluide, sans pesanteur ni temps mort. Le découpage et les cadrages cinématographiques apportent un dynamisme indéniable à l’histoire. Progressivement, les teintes vont virer des ocres du début aux bleus-gris, plongeant dans les froidures du grand nord, les ambiances rougeoyantes du saloon n’en dégageant que davantage de chaleur sensuelle et morbide. De superbes scènes émaillent l’album comme l’arrivée plongeant sur Creeple’s Junction ou encore la belle scène d’amour dans les eaux thermales où Miss Blondie Beauregard ruisselle et resplendit d’un charme envoûtant. Les personnages sont crédibles, rusés et attachants. « Abracadabra, Sebastian Zondrick… ». L’épilogue tenant en une ultime planche est une belle ouverture sur la vie caracolant.

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