[La sexualité des ados racontée par eux-mêmes | Didier Dumas]

Sans avoir d'enfant et tout en étant de moins en moins proche des adolescents (français de cette première décennie du XXIe s.), je me doutait que derrière une sexualité à l'apparence si désinhibée et affichée, des malaises, des troubles, des traumatismes pouvaient se dissimuler et qu'ils seraient à mettre en relation avec l'outrance pornographique de la société de l'image ( ou la cité perverse - pour paraphraser l'excellent essai de Dany-Robert Dufour).
Ce qui fait l'intérêt - mais aussi toutes les limites - de cette étude, c'est d'être née d'une série d'entretiens menés par un adolescent auprès de filles et garçons d'environ son âge, discutés et commentés par le psychanalyste auteur, dans un registre quasi oral, à l'instar des entretiens eux-mêmes. La démarche possède donc une valeur unique liée à la source du matériau : car l'on comprend aisément que les interviewés ne se seraient pas livrés (ou pas de la même façon) à un adulte. Un corpus recueilli par un thérapeute, a fortiori, eût été aberrant. Les inconvénients, ce sont les carences en profondeur et en rigueur démonstrative de commentaires qui sont à la fois largement impromptus, adressés à un jeune, et à vocation plutôt didactique voire de vulgarisation. Les redites sont donc nombreuses ; les concepts souvent insuffisamment éclaircis, et l'on ne peut s'empêcher de penser qu'un autre corpus (bien que celui-ci ne manque pas de variété, et même d'une diversité profondément stupéfiante !) aurait provoqué un texte différent.
Si certains y retrouveront peut-être des problématiques personnelles plus ou moins reculées dans leur propre biographie, les parents auront sans aucun doute de quoi se (ré)interroger sur l'éducation sexuelle prodiguée (ou non, bien ou mal, suffisamment ou pas, à temps ou tardivement ?...) à leur progéniture. Et le verdict pourra(it) bien être sévère, car il s'avère que l'outrance de la vue est hélas accompagnée d'un assourdissant silence parental - l'absence de la parole équivaut à autant d'impossibilité d'imagination et de conceptualisation - source mortifère d'une pléthore de dysfonctionnements divers dans la sphère sexuelle.

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