Bon, Stéphane Hessel nous rappelle (ou nous apprend, à ceux qui, comme moi, n'ont pas eu d'éducation politique) ce qu'est le conseil national de la résistance, et ce qu'il a mis en oeuvre.
Là où j'accroche moins, c'est le fameux discours bien convenu dans les partis et syndicats de gauche (enfin... la "vraie" gauche ;-D) : "oui, heu, attention, les vieux se sont battus pour que vous ayez des droits à la retraite, alors merci de bosser toute votre vie pour que vous ayez vous aussi une retraite..." Bref, je suis conscient de la nécessité des choses qui ont été mises en place par le CNR et de tous ceux qui ont travaillé avec lui à l'instauration d'une société plus juste. Mais en même temps, est-ce que - sous prétexte d'une société plus juste - chacun doit sacrifier sa vie? Ne peut-on pas imaginer une société dans laquelle ceux qui ne veulent pas travailler puissent ne pas travailler, sans pour autant être démunis des droits inhérents à l'humain (genre... santé, etc.).? Comme le dit S. Hessel, au lendemain de la guerre, la France n'avait rien à partager. Et on a réussi à mettre en place la retraite et la sécu. Aujourd'hui on arrive à chier du fric (parce que quand même, soyons honnêtes, c'est bien de la merde qu'on nous vend) et on n'y arriverait plus? De qui se fout-on?
Donc oui, merci à ces gens au lendemain de la guerre, pour la plupart résistants, d'avoir pensé une société moins injuste. Mais puisque nous en avons les moyens, au lieu de 'sauvegarder' un système duquel nous sommes devenus les esclaves, de grâce, dépassons-le par plus de générosité!!!
Voici ce qu'écrivait à ce propos un ami proche :
"Il y a peu, un ex-diplomate et ancien résistant publiait un opuscule dans lequel il expri-
mait à ses lecteurs ce voeu: "je vous souhaite à tous d'avoir votre motif d'indignation",
érigeant par là le fait de s'indigner - quel qu’en soit le motif - en valeur absolue. 1
Un minimum de rigueur intellectuelle suffit à démontrer la faiblesse du propos : quand
un partisan de l’extrême-droite s’indigne du nombre de personnes d’origine étrangère
évoluant sur le sol français, il ne vient à personne l’idée de le qualifier de vertueux.
Aussi dignes soient-ils, "Indignez-vous !" et son audience entretiennent le règne
de l’émotion qui caractérise notre temps, en compensation au cynisme politique.
"Indignation" et "action" sont non seulement dissociées mais opposées (...)
De fait, quand [les hommes] vivent une crise (économique, financière, politique…), ils
entendent y mettre fin par des réformes - des "ajustements structurels", comme
ils les appellent parfois - qui ne traduisent en rien la moindre "indignation" mais
qui expriment au contraire une vision froide, détachée, techniciste du monde.
Or il fut un temps où un seul mot symbolisait l’indignation et l’action : révolution.
Si ce terme et ce qu’il désigne sont aujourd’hui "révolus", d’où cela vient-il ?
Du fait que les hommes estiment aujourd’hui que les crises sont sectorielles et
que ce n’est jamais l’ensemble d’un système qui est en cause mais seulement
telle ou telle de ses composantes. Parce qu’ils sont incapables de "penser
globalement" le monde, il ne peuvent agir sur lui : ils évoluent dans l’illusion.3
Ainsi, face à l’injustice, ils peuvent s’indigner autant qu’ils le veulent, leur colère
est devenue intraduisible en pensée. La révolution est impossible car impensable.
Affirmer cela n’est pas céder au défaitisme, c’est faire acte de lucidité."
Et ça, ça me parle!
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