D'Ursula Le Guin, j'avais surtout abordé ses romans "fantasy" tels Tehanu et le cycle de Terremer, très agréables au passage. Ici, nous avons affaire à un vrai roman de science fiction.
L'histoire se déroule à l'autre bout de la galaxie, l'humanité s'est disséminée, adaptée et développée de différentes manières suivant les environnements qu'elle a rencontrés. L'Ekumen, sorte d'organisation inter-galactique à visée humaniste rappelant un peu l'ONU, envoie un représentant sur une planète à l'écologie particulièrement hostile (période glaciaire) et aux sociétés assez arriérées (monarchistes). Le but est de faire adhérer cette planète aux valeurs de l'Ekumen. On n'en sait pas plus sur les motivations de cette dernière, si ce n'est de faire progresser la vie des sociétés humaines éclatées, et donc on a un peu de mal à comprendre la mission de l'Envoyé.
Toute la première partie du roman est consacrée à un récit de diplomatie qui peut sembler ennuyeux (ronds de jambes, machiavélisme...), la seconde est radicalement différente : on passe à un road-movie, expédition polaire qui place les deux personnages principaux, aux caractères antagonistes, dans un huis-clos psychologique passionnant.
La rédaction de cette petite chronique, quelques semaines après la lecture du roman, me permet d'avoir un regard plus détaché de l'histoire et des sensations que j'éprouvais à sa lecture. Globalement, je me rends compte que les thèmes abordés sont très riches (l'étranger et la différence, le regard de l'autre, les a priori) Les moyens employés pour les présenter, le style d'écriture, la forme de la narration (conte, monologue, discussion, poésie...) sont divers et colorés.
J'ai du mal à mettre une note de 5 à cet excellent roman, car je ne lui trouve pas le caractère fulgurant de chefs d'oeuvre comme les "Chroniques martiennes" ou "Le monde inverti".

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Merci drallibor pour votre note de lecture agréable à lire au sujet de La Main gauche de la nuit d'Ursula Le Guin.

Je comprends bien vos réticences et votre enthousiasme mêlés. Ils ont été aussi les miens il y a une trentaine d'années quand j'ai découvert l'auteur par ce livre.

J'avais été subjugué par la richesse du propos et par le style fait de retenues et de digressions qui me restituaient presque de manière tangible la solitude des personnages principaux sur Nivôse, planète glacée, éloignée de tout, fermée sur elle-même. La course poursuite dans la glace a été pour moi un morceau d'anthologie, avec le dépouillement, la mise à nu progressive lié à une marche extrême. L'idée que le missionnaire passe pour un monstre libidineux parce qu'il est sexuellement "disponible" à tout moment alors que les habitants de Nivôse ne s'éveillent à la sexualité qu'au cours de cycles qui les feront soit homme, soit femme, l'idée aussi que cet homme accepte sa mission avec la certitude de ne jamais retrouver sa planète d'origine, tout cela m'avait fortement ému et intrigué à l'époque.

C'est vrai que le début du roman, comme vous le soulignez, peut sembler un peu fastidieux mais une fois passé ce cap, on est dans le vif du sujet et la dernière page tournée, le livre s'imprime pour toujours dans la mémoire. En tout cas cela s'est passé ainsi pour moi.

Franz