[Manifeste contre le travail | Krisis, Robert Kurz, Ernst Lohoff, Norbert Trenkle]
0 - Intro. (Prémisse)
Suite à la troisième révolution industrielle (la micro-informatique), le travail est mort, car : 1. "l'innovation de procédés va plus vite que l'innovation de produits" ; 2. "on supprime davantage de travail qu'on ne peut en réabsorber par l'extension des marchés".
1 - "La domination du travail mort"
"Mais, dans cette société, celui qui ne peut vendre sa force de travail est 'superflu' et se trouve jeté à la décharge sociale" (p. 14)
"Et le mot selon lequel il vaut mieux avoir 'n'importe quel' travail que pas de travail du tout est devenu la profession de foi exigée de tous". (p. 15)
2 - "La société d'apartheid néolibérale"
"Elles [les fractions du camp du travail] ne s'affrontent plus pour savoir SI une part toujours plus grande de la population sera ou non laissée sur le bord de la route et exclue de cette participation sociale, mais seulement COMMENT faire passer, bon gré mal gré, cette sélection. La fraction néolibérale abandonne en toute tranquillité la sale besogne du darwinisme social à la 'main invisible' du marché". (p. 17-18)
3 - "L'apartheid du néo-Etat social"
"Aujourd'hui, l'Etat ne regarde pas à la dépense pour que des centaines de milliers d'hommes et de femmes simulent le travail disparu, dans d'étranges 'ateliers de formation', ou 'entreprises d'insertion' afin de garder la forme par des 'emplois' qu'ils n'auront jamais. On invente toujours des 'mesures' nouvelles et encore plus stupides simplement pour maintenir l'illusion que la machine sociale, qui tourne à vide, peut continuer à fonctionner indéfiniment." (p. 24)
4 - "Aggravation et démenti de la religion du travail"
Sur l'imposture du travail comme 'loi naturelle'. "Comment expliquer[...] qu'aujourd'hui les trois quarts de l'humanité sombrent dans la misère précisément parce que la société du travail n'a plus besoin de leur travail ?". (p. 30)
5 - "Le travail, principe social coercitif"
"Dans la sphère du travail, ce qui compte n'est pas tant CE QUI est fait, mais LE FAIT QUE telle ou telle chose soit faite en tant que telle, car le travail est une fin en soi dans la mesure même où il sert de vecteur à la valorisation du capital-argent, à l'augmentation infinie de l'argent pour l'argent". (p. 33)
6 - "Travail et capital : les deux faces de la même médaille"
"Mais si la classe ouvrière [...] n'a jamais été l'antagoniste du capital et le sujet de l'émancipation humaine, réciproquement les capitalistes et les managers ne dirigent pas la société selon la malignité d'une volonté subjective d'exploiteurs". (p. 37)
7 - "Le travail, domination patriarcale"
Le travail, broyant l'espace social en sphère du produit et sphère du foyer, crée également les stéréotypes sexuels.
8 - "Le travail, activité des hommes asservis"
Sur les liens sémantiques et étymologiques entre 'travail' et asservissement.
9 - "L'histoire sanglante de l'instauration du travail"
Extension des conditions du marché et ingérence de l'Etat dans l'économique à partir de l'époque de l'absolutisme, pour assouvir les insatiables besoins financiers de la machine de guerre de la modernité naissante.
10 - "Le mouvement ouvrier : un mouvement pour le travail"
Le mouvement ouvrier est l'héritier de l'absolutisme, du protestantisme et des Lumières. "Les ilotes domestiqués du travail ont inversé pour ainsi dire les rôles idéologiques et ont fait preuve d'un zèle de missionnaires, d'une part en exigeant le 'droit au travail' et, d'autre part, en invoquant le 'devoir de travail pour tous'". (p. 54)
11 - "La crise du travail"
Sur les conséquences de la troisième révolution industrielle (cf. Intro) sur le travail.
12 - "La fin de la politique"
Au XXe siècle, l'Etat a dû assumer de plus en plus de tâches socio-économiques. Mais "Il doit puiser l'argent dans le procès réel de valorisation pour financer ses tâches. Quand la valorisation se tarit, les finances de l'Etat se tarissent aussi". (p. 66)
13 - "La simulation de la société du travail par le capitalisme de casino"
"[...] ce n'est pas la spéculation qui a causé l'arrêt des investissements réels, mais [...] ceux-ci étaient déjà devenus non rentables à cause de la troisième révolution industrielle et [...] l'envolée spéculative n'en est qu'un symptôme". (p. 74)
14 - "Le travail ne se laisse pas redéfinir"
"Après des siècles de dressage, l'homme moderne est tout simplement devenu incapable de concevoir une vie au-delà du travail. En tant que principe tout-puissant, le travail domine non seulement la sphère de l'économie [...] mais pénètre l'existence sociale jusque dans les pores de la vie quotidienne et de l'existence privée". (p. 78)
15 - "La crise de la lutte d'intérêts"
"[...] l'individualisation tant invoquée n'est qu'un autre symptôme de la crise dans laquelle se trouve la société du travail. Pour autant que des intérêts puissent encore être agrégés, cela ne se produit qu'à l'échelle micro-économique". (p. 84-85)
16 - "Le dépassement du travail"
"La discussion directe, l'accord et la décision commune des membres de la société sur l'utilisation judicieuse des ressources remplaceront la production marchande, tandis que se réalisera l'identité socio-institutionnelle entre producteurs et consommateurs (impensable sous le joug de la fin en soi du marché capitaliste)". (p. 94)
17 - "Contre les partisans du travail : un programme des abolitions"
Prise en compte du gaspillage de ressources nécessaire à entretenir le 'travail mort' dans tout ce qu'il a de coercitif.
18 - "La lutte contre le travail est une lutte anti-politique"
Du fait que cette lutte soit un mouvement d'appropriation à mener à l'encontre de l'appareil d'Etat, et ne visant pas à s'emparer des commandes du pouvoir.
Mes commentaires :
Si j'ai pris le temps de transcrire autant de texte pour un ouvrage si court, presque une plaquette, c'est qu'il s'agit précisément d'un manifeste, fort influencé dans son style par celui de Marx-Engels. Il est plein de phrases percutantes aptes à être citées (que j'avais choisies dans une première lecture), mais qui sembleraient d'abord décousues, insuffisamment développées et quasi non démontrées. En réalité, une seconde lecture rapide m'a permis de comprendre que : le plan existe et il est très rigoureux ; chacun des courts chapitres pourrait être développé mais cela ferait du livre un véritable traité ; que les citations à retenir n'étaient pas les plus percutantes mais d'autres, que j'ai considérées comme plus juteuses et substantifiques, et qu'elles méritaient d'être donc toutes retenues.
La faille principale du Manifeste, cependant, est sa partie propositive, contenue dans les trois derniers chapitres (surtout le 16 et le 18), qui peut vraiment sembler trop utopique ou alors vraiment insuffisamment précisée : mes cit. contribuent certes à témoigner de ma perplexité.
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