1ère partie, "Les temps nouveaux": j'accroche immédiatement. A l'écriture, sobre mais sensorielle, à l'humour caustique (l'oeuf, les os en plastec), et à l'anticipation: réchauffement climatique, mondialisation, hydroculture et manipulations génétiques, campagnes délaissées et villes engorgées, épuisement des matières premières (eau), humains esclaves du progrès,... Le roman est écrit en 1942, et je me dis: épatant.
"La chute des villes" et "Le chemin de cendres" constituent l'essentiel du bouquin. Ici aussi, le style fait mouche, en dépit de quelques longueurs (principalement dans "Le chemin des cendres").
La dernière partie, "Le patriarche", devient carrément dérangeante, voire écoeurante. Par l'intérmédiaire de François, le personnage principal, Barjavel reconstruit un nouveau monde aux valeurs dignes d'un régime totalitaire: autorité et culte d'un patriarche omnipotent, religion basée sur l'amour de Dieu et de la famille, hypervalorisation du Travail, destruction des livres (!), qui encouragent à penser et sont donc la source du Mal absolu: le progrès. (Heureusement, Bradbury proposera en 1953 un autre point de vue sur la destruction des livres).
A plusieurs reprises, j'ai lu la réputation misogyne de l'auteur. Pour moi, le caractère choquant se trouve bien au-delà. Certaines expressions me laissent déconfite: "la mâle autorité", "le courroux divin", "une race de maîtres". Le futur chef, Paul, est un archétype de la "race pure": blond aux yeux bleus, musclé, viril. Le roman est écrit en 1942, et là je me dis: l'auteur s'est-il laissé séduire par quelque nauséabonde idéologie?
En résumé, ma note est pour l'écriture et pour la 1ère partie, très séduisantes. Quant au reste, si je dois un jour détruire un livre, ce sera la dernière partie de Ravage.
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