Il est bien loin le temps où l'Europe était curieuse du monde arabe, et le monde arabe de l'Europe. La peur a succédé à la curiosité, la violence au dialogue.
L'or de Paris est un témoignage de cette époque révolue, celle du XIXe siècle commençant d'une Europe en pleine mutation et d'un Orient en plein questionnement. Rifâ'a est alors un imâm égyptien chargé, en 1826, d'accompagner une délégation d'étudiants égyptiens en France, invités à étudier auprès des "meilleurs". Rifâ'a a pour rôle de veiller à la conservation de l'intégrité morale des étudiants dans cette contrée étrangère.
L'ironie de cette aventure, digne d'un roman, c'est que les étudiants seront vite oubliés, que c'est Rifâ'a qui sera le personnage le plus important de la délégation et celui que l'histoire retiendra. En France, Rifâ'a apprend la langue française, étudie les disciplines dans lesquelles les professeurs français sont versés. Mais surtout, il écrit une relation de voyage,
L'or de Paris. Il pose sur la France un œil tantôt étonné, tantôt désapprobateur, mais toujours curieux. Si les mœurs des français lui paraissent parfois exotiques, il est conscient du retard égyptien, et s'abreuve volontiers de la connaissance française. Il noue des amitiés fortes avec certains dignitaires français.
Personnage éminent de la renaissance arabe (
al-nahda), Rifâ'a al-Tahtâwî doit beaucoup à la France. C'est de ce voyage que naît chez lui cette volonté de traduire en arabe les œuvres majeures des sciences européennes; il fonde alors une école de langues et un bureau de traductions. Malheureusement les dirigeants égyptiens ne seront pas toujours favorables à ses idées, allant jusqu'à l'exiler un temps.
L'or de Paris nous permet de mieux connaître dans le même temps l'Égypte du XIXe, la France du XIXe, mais également les français et les égyptiens, et leurs regards croisés. La vie même de Rifâ'a nous prouve que le dialogue est possible. Pour s'en convaincre, il faut lire Rifâ'a.
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