Premier volume d’une trilogie autobiographique, Le goût du cidre détrône La première gorgée de bière par sa force poétique non frelatée, perceptible dans sa traduction française. Bien que les deux œuvres n’aient aucun rapport, quoique !, elles ne chantent pas au palais avec la même finesse. D’ailleurs, voici la description d’une liqueur concoctée par Grand-mère Wallon à partir de récoltes sauvages faites dans les champs et les haies avec des primevères, pissenlits, pavots, sureaux… : « La liqueur était douce et dorée, transparente comme un pâle matin de printemps. Elle sentait l’herbe en fleurs dans un champ lointain et avait un goût aussi délicat que l’air ». Il existe bien dans ce livre de souvenirs une « pureté de ton et de langue prodigieux » comme le souligne le traducteur et préfacier Patrick Reumaux. Laurie Lee revient à nouveau à la sensation gustative pour suggérer l’émerveillement, la force et la fraîcheur du premier amour : « Inoubliable, cette première longue et secrète gorgée de feu doré, jus de ces vallées et de ce temps, vin des vergers sauvages, de l’été roux, des belles pommes rouges et des joues brûlantes de Rosie. Inoubliable et dont je ne devais jamais retrouver le goût… » On ne peut être qu’ébahi face à ce livre de souvenirs, tout en retenue, hanté par le souffle poétique des paradis perdus. Il ne reste plus au lecteur qu’à partir marcher sur les traces de Laurie Lee dans la vallée des Cotswolds au Pays de Galles, à Sheepscombe, Stroud ou Gloucester. Peine perdue, peut-être, trop de barrières à franchir, joie à la clé aussi ! Ce désir d’aller sur les pas de l’écrivain provient sans aucun doute de la force irradiante du livre.
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