Zweig y brosse en quelques coups de plume le portrait de cette époque charnière : celle de l'ouverture au monde de la vieille Europe, le moment où les espagnols croient redécouvrir les Indes, les portugais le Brésil et d'autres encore l'Afrique du sud, bref, l'époque où l'on comprend enfin ce que l'on savait déjà sans comprendre : la Terre est ronde.
De ce petit opuscule d'une centaine de pages, le prétexte (mais n'est-ce vraiment qu'un prétexte sous la plume de Zweig ?) peut paraitre futile : pourquoi donc a-t-on donné à ce Nouveau Monde le nom d'Amérigo Vespucci alors que Christophe Colomb était passé par là avant lui ?
C'est qu'au-delà de leurs voyages respectifs, ces deux-là n'étaient pas embarqués dans la même galère : Amérigo eut le mérite d'écrire, même si ce n'était que quelques lettres de commerçant, et si les voyages permettent vertes, de s'envoler, les écrits, eux, restent.
D'autant plus que ceux d'Amérigo furent traduits, repris, transposés, interprêtés et même transformés ...
[...] De toutes les feuilles volantes de cette époque, depuis la première lettre où Colomb, en 1493, annonçait avoir atteint des îles proches du Gange, aucune n'a eu un retentissement aussi large et aussi profond que les huit pages de cet Albericus totalement inconnu jusque là. [...] Le grand succès de ce livret minuscule est très compréhensible. Car cet inconnu, ce Vespucci, est le premier de tous les navigateurs qui sache raconter, et de manière amusante.
Et si cette époque fut bien celle des voyages, on tient peut-être là (avec ce vrai-faux procès en paternité géographique) une des premières affaires où la chose écrite pris le pas sur la réalité des faits.
Un petit récit historique et intelligent, captivant comme un polar et passionnant comme pouvait l'être l'aventure humaine à cette époque.
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