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[Toutes habitantes tous habitants | Carole Chaix, Anouk ...]
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Posté: Jeu 04 Avr 2024 6:53
MessageSujet du message: [Toutes habitantes tous habitants | Carole Chaix, Anouk ...]
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[Toutes habitantes tous habitants | Carole Chaix, Anouk Migeon]

Ce reportage dessiné est né des regards croisés d'une architecte-dessinatrice (A. M.) et d'une illustratrice (C. Ch.), en résidence de création durant deux ans auprès de l'équipe de l'Espace Solidarité Habitat de la Fondation Abbé Pierre, afin de documenter la problématique du mal-logement à Paris ainsi que le fonctionnement de cette institution et de ses partenaires. Le principe a été à la fois l'écoute des autrices et la participation active des travailleurs sociaux chargé.e.s de mission et bénévoles de l'association ainsi que des bénéficiaires, dans les locaux ainsi que lors des visites à domicile. Les textes et fragments recueillis, de nature très diverse mais tous très abondamment illustrés dans une mise en page changeant à chaque planche de deux pages, ont été articulés sous la forme d'un abécédaire thématique : « Par bout, par tranche, se servant d'une lettre, puis d'une autre... cet abécédaire illustré, poétique et engagé, raconte aussi une façon de travailler au plus près des habitant.e.s » (p. 177) :
A : Accueillir, Accompagner, Accès aux droits, Agence régionale, Architectes.
B : Bénévolat, Bonnes nouvelles.
C : Clés, Crise du logement en Île-de-France, Chargé.e.s de mission, Commissions, Collaboratrices et collaborateurs.
D : Droit au logement, Droit au logement opposable [DALO], Discrimination, Dénoncer.
E : Espace Solidarité Habitat, Équipe, Expulsion, Engagement.
F : Façades, Fenêtres.
G : Galères.
H : Habiter, Hôtel.
I : Immeuble, Isolement, Insalubrité, Indécent, Impropre à l'habitation.
J : Juriste.
K : Monsieur K.
L : Madame et monsieur L.
M : Ménages, Mal-logement.
N : Nuisibles.
O : Oser parler.
P : Participatif, Parole, Paris, Partenaires, Précarité énergétique.
Q : Questions.
R : Recherche logement, Réseau des avocats.
S : Santé.
T : Trêve hivernale.
U : Utopie.
V : Visite à domicile.
W : week-end à Paris.
X : XXe arrondissement.
Y : Madame Y.
Z : Zone à défendre.

Très centré sur la primauté du droit et sur le fonctionnement de l'Association, le caractère engagé de cet ouvrage qu'elle a voulu gratuit se mesure cependant aussi à l'originalité à la fois des textes et des dessins, qui dans leurs traits parfois très gros, parfois menus et techniques, savent toujours frapper l'esprit du lecteur. Ainsi du dessin d'une foule compacte et soucieuse sur un quai et dans un wagon de métro, où des lignes verticales associent quelques visages parmi la multitude aux inquiétudes du mal-logement recopiées dans la cit. 2 (p. 22). Ainsi aussi de la noirceur des pages relatives à la santé mentale, à certains témoignages et à quelques intérieurs insalubres, alors que l'ensemble des personnes dont la parole est reprise sont portraiturées en situation. À noter également les planches sur l'expulsion (pp. 68-69) qui filent la métaphore d'une balle de bowling frappant des quilles, pouvant être vue aussi comme la déflagration d'une bombe sur des civils projetés dans tous les sens.
L'on est frappé par l'ampleur du phénomène du mal-logement, surtout en Île-de-France : si la honte, la crainte ou les obstacles dus à d'autres problématiques concomitantes (notamment la situation administrative irrégulière, de multiples problèmes de santé physique et mentale, etc ;), ou enfin l'ignorance des droits au logement et de l'existence d'associations de défense de ces droits n'empêchaient pas les victimes de sortir dans la rue pour manifester, sans doute l'appel de l'Abbé Pierre de l'hiver 1954 ne serait-il pas resté un événement historique isolé, et la transformation de Paris en ville ultra-capitaliste ostracisant et maltraitant les pans les plus fragiles de ses habitants, aujourd'hui par la prolifération incontrôlée des locations Airbnb tout comme jadis par les spéculations du baron Haussmann et toujours par l'insuffisance de ses logements sociaux, ne serait-elle pas aussi facilement invisibilisée...



Cit. :


1. « En deux mots, si vous cherchez sa définition [du mal-logement], deux critères essentiels le qualifient :
- Les caractéristiques techniques du logement. Elles englobent des habitats insalubres, précaires et/ou de fortune.
- Le statut juridique des habitant.e.s par rapport au logement. Une personne mal logée est une personne qui ne maîtrise pas elle-même la durée de son hébergement. Cela recoupe le cas de personnes sans domiciles (qui ne sont pas toutes sans abris), ou encore des personnes accueillies chez des proches ou des tiers. Mais cela désigne aussi des conditions de vie difficiles voire précaires de personnes vivant encore dans leur logement (privation de confort, suroccupation, logements insalubres, en procédure d'expulsion, précarité énergétique).

Ce phénomène touche des personnes de tout âge. Selon le 26e rapport sur l'état du mal-logement en France par la Fondation Abbé Pierre [2021], près de 4 millions de personnes sont mal logées, et 12,1 millions de personnes sont aujourd'hui touchées, de près ou de loin par la crise du logement ». (p. 17)

2. « "C'est la honte, je ne peux recevoir personne chez moi... Chez moi ? façon de parler..."
" Nous dormons avec nos pulls et nos écharpes "
" Je viens de recevoir un commandement de quitter les lieux "
" Je ne peux plus payer mon loyer, j'ai peur qu'on m'expulse ! "
" Je ne peux plus vivre comme ça, mon bébé vient de naître, mon aîné va au collège et le grand répare le plafond qui s'écroule. "
" Ma fille a des allergies, elle respire mal depuis qu'elle est née. Les taches ? Au début il y en avait moins. "
" Mon mari vient de me quitter, je n'étais pas sur le bail de l'appartement. "
" Ce n'est plus possible, je ne m'en sors plus... machine à laver en panne, matelas condamné : je ne supporte plus ces punaises ! "
" Qu'est-ce que la petite va manger ce soir ? Je suis au bout du rouleau. " » (p. 22)

3. « Si le Préfet n'attribue pas de logement, les tribunaux administratifs peuvent être à leur tour saisis et condamner l’État à une astreinte. À la création de la loi DALO en 2007, cette sanction financière allait à un fond servant à construire des logements. Deux années après, la loi Boutin redirige ce fond pour des associations d'Accompagnement Vers et Dans le Logement (AVDL). L’État préfère accompagner plutôt que faire construire. Il préfère payer des associations pour annoncer aux 260.000 ménages inscrits comme demandeurs de logements sociaux à Paris en 2019 qu'il n'y a eu que 10.211 attributions de logements sociaux à Paris et 6.600 logements construits. […]
À l'origine de la loi, les astreintes touchées par les ménages pouvaient représenter jusqu'à environ 3.000 € par mois. La loi Boutin l'a plafonné à quelques centaines d'euros par mois...
Ou comment rendre ineffective une loi.
Garder le symbole, garder le texte,
Mais la rendre inopérante.
Les finances de l’État avant tout,
Les ménages et leur droit après tout. » (p. 54)

4. « "Constituent un habitat indigne les locaux ou installations utilisés aux fins d'habitation et impropres par nature à cet usage, ainsi que les logements dont l'état, ou celui du bâtiment dans lequel ils sont situés, expose les occupants à des risques manifestes pouvant porter atteinte à leur sécurité ou à leur santé." [ex art. 84, loi 25/03/2009]
"La possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent est un objectif de valeur constitutionnelle."
Mais après, dans la réalité de tous les jours, il y a le quotidien du mal-logement qu'il faut gérer, les soi-disant détails qui pourrissent des vies.
Cet homme qui devait aller faire ses besoins au café au bout de la rue. Le cafetier comprenait.
Cette femme qui dormait pliée en quatre sur le canapé pour laisser la place à ses quatre enfants. C'était un ancien local à poubelle loué.
Ce nouveau-né dont la maman n'avait plus d'eau chaude depuis cinq mois, alors que l'hiver approchait.
Cette lampe toujours allumée. Au réveil, pour manger, cuisiner, faire les devoirs, la toilette. Un quotidien sombre dans ce studio avec seulement une lucarne.

Surmonter la honte et arriver à l'Espace Solidarité Habitat. Pour certains ménages c'est parfois réaliser qu'ils vivent dans un logement insalubre, seulement lors de leur accompagnement pour une procédure d'expulsion. Quand les chargé.e.s de mission se rendent compte de l'état du logement et des infractions commises par les bailleurs indélicats.
C'est aussi ça le quotidien d'Asimina. Aider les ménages à avoir de l'eau chaude, un radiateur pour l'hiver, un WC, plus de mètre carré et assez de lumière naturelle et d'air pour respirer. Vivre dignement. » (p. 99)

5. « Un ménage,
unité statistique,
unité de population occupant un même logement.
Un, deux, trois, quatre, cinq...
… personnes vivant sous le même toit.
Je suis un ménage.

Faire le ménage. Habiter un lieu demande de l'entretien, d'y mettre de l'ordre et parfois un ménage de fond. Le ménage est dedans et dehors, en éliminant l'inutile qui prend trop d'espace ou la mauvaise place. Les objets, les choix et les gens autour de soi.

Scène de ménage. C'est une querelle sous un toit de personnes vivant ensemble ? Alors que le mot devrait dire : scène d'amour où les personnes prennent soin l'une de l'autre sous un même toit.

Un ménage. Vivre ensemble. Être avec toi. Être avec toit. Nous. Prenons soin de nous. Ménageons-nous.
"Ménager plutôt que dé-ménager" » (p. 110)

6. « Moi, j'ai 41 points [cotation pour la sélection des dossiers des postulants aux HLM]
- Quoi ! et vous n'avez toujours pas de logement ?
- Aujourd'hui, je dois juste 3 mois de loyer et je viens de recevoir une assignation pour expulsion. Je vais aller à l'hôtel ? encore ?
Quand j'ai fait ma première demande de logement, mon fils avait un an, aujourd'hui, il a 20 ans. C'est long, je suis fatiguée.
- Je comprends, vous êtes prioritaire DALO et pourtant on vous expulse. Je sais, c'est nul, c'est tout notre combat. Quand vous serez expulsée, vous aurez au moins un endroit à l'abri, un hôtel, un hébergement d'urgence.
- 20 ans d'attente, un temps anormalement long ? Moi, je trouve que c'est un crime.
- Avez-vous pensé à saisir le défenseur des droits ? pour signaler qu'il y a une discrimination, que vous êtes victime ?
- S'il faut attendre 100 ans, il n'y a plus aucun sens. » (p. 141)

7. « Si une personne vous dit qu'elle a un problème de santé mentale, c'est qu'elle attend un retour. Toujours la croire et se saisir de l'information. Quand la personne explique que son problème psychologique est lié au fait qu'elle n'a pas de logement, nous faisons relais. Je lui apporte une écoute et avant qu'il y ait Soutien Insertion Santé présent à l'Espace Solidarité Habitat, je la réorientais vers des associations spécialisées. Mais toutes les personnes en précarité ne nécessitent pas un accompagnement psychologique.
[…]
Au début, les situations te font pleurer, tu ne sais pas comment répondre, tu ne l'avais pas vu venir. Alors que maintenant, une famille qui se fait expulser... j'anticipe davantage, sinon, comment fais-tu pour rentrer chez toi sereine ? En ne rêvant pas de cette personne ? Et comment fais-tu aussi dans l'organisation interne ? En analyse des pratiques, finalement nous parlions beaucoup d'organisation interne et pas forcément des familles. » (pp. 147-148)

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