Bestiaire enchanté.
Elégante et sobre, la collection Bibliophilia aux éditions José Corti attire le regard avec sa couverture vert amande d’autant que les thématiques abordées sont riches et passionnantes. Dans le hall impersonnel de Lascaux IV, en attendant la prochaine visite, le livre de Gwenn Rigal, guide-interprète à Lascaux II, s’est naturellement imposé au visiteur. En feuilletant l’imposant bouquin, la richesse du propos et la limpidité de l’écriture sautent aux yeux. En acquérant « Le temps sacré des cavernes », il n’y avait plus qu’à espérer que l’auteur soit de service mais il était en repos ce jour-là. Son œuvre parlera pour lui. Avec modestie mais détermination, Gwenn Rigal fait dialoguer les théories émises par des spécialistes de la préhistoire cherchant à comprendre la signification de l’art pariétal. La capacité de l’auteur à synthétiser une masse énorme de documents savants (la bibliographie en fin de volume en témoigne) pour les restituer avec clarté est stupéfiante. Ainsi le pourquoi de l’art des cavernes oscille au gré des propositions des préhistoriens, une thèse chassant l’autre et c’est passionnant à suivre. Pour le néophyte, l’émerveillement surgit presque à chaque page. Les idées préconçues tombent les unes derrière les autres et c’est une cure de jouvence intellectuelle. Il y est question d’invariants culturels, de temps long, de pensée symbolique, de chamanisme, de totémisme, etc. Les sites de l’arc franco-cantabrique défilent et délivrent un léger tournis par leur nombre et leurs richesses. D’autres lieux sont évoqués tel le nord de l’Australie où le dessin d’un émeu géant sous abri a été trouvé. Cette espèce animale s’est éteinte depuis au moins 40 000 ans. On peut juste regretter que les nombreuses illustrations en noir et blanc ne soient pas légendées dans le texte et qu’elles ne rendent pas compte de la beauté intrinsèque des peintures, gravures et objets reproduits mais cette critique minime ne concerne qu’une présentation éditoriale un peu trop chiche pour pareil propos. Le texte de Gwenn Rigal aurait mérité un écrin mieux adapté. Quoi qu’il en soit, « Le temps sacré des cavernes » est une véritable pierre angulaire dans les écrits de vulgarisation sur le paléolithique dont les clés de compréhension nous feront toujours défaut.
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