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[L'Hypnose | Sigmund Freud]
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Posté: Sam 19 Mar 2022 16:12
MessageSujet du message: [L'Hypnose | Sigmund Freud]
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Trop longtemps, l'on a eu l'impression que la psychanalyse était surgie d'une intuition géniale et soudaine de Freud, telle une fulguration en rupture avec son temps que rien ne permettait d'anticiper et qui cependant contrevenait au caractère diligent, scrupuleux, tenace et infatigable de son auteur. Conséquemment, les rapports de Freud à l'hypnose – celle qu'il avait observée auprès de Charcot à la Salpêtrière à Paris, ou bien celle que, en opposition à celle-ci, « l'école de Nancy » de Liébeault et de Bernheim pratiquait, ou encore celle qu'ostracisait et raillait la neurologie allemande – ont été souvent mal compris, comme si le jeune docteur, après une pratique de plusieurs années sans doute infructueuse, avait éprouve de la repentance voire abjuré cette méthode thérapeutique en faveur d'une nouvelle de son cru, la psychanalyse. Il n'en est rien, bien entendu.
Ce livre se compose de deux parties d'égale envergure : « Sigmund Freud, hypnotiseur » par le philosophe et historien de la psychanalyse Mikkel Borch-Jacobsen, et un recueil de textes de Freud sur l'hypnose, datés entre 1886 et 1893, dont des rapports, communications à des colloques, préfaces d'ouvrages de Charcot et de Bernheim traduits par lui-même, compte-rendus d'ouvrages, le récit d'un cas clinique couronné de succès concernant sa femme (anonymisée) et enfin quelques lettres inédites. Il témoigne d'une évolution graduelle et cohérente qui n'a rien d'une rupture mais tout d'une synthèse brillante entre les différentes interprétations de l'hypnose, les polémiques et les interrogations sincères de son temps, synthèse fondée sur une expérience en cours d'acquisition répondant aux réserves qu'un milieu encore majoritairement hostile émet à l'encontre de cette technique thérapeutique rejetée jusqu'alors. Les réserves, ce sont celles qui persistent encore aujourd'hui chez le profane : l'hypnose est-elle un état pathologique – éventuellement provoqué par l'hystérie, comme le comprenait Charcot ? Son usage est-il donc dangereux ? N'est-elle au contraire que suggestion, comme le soutenait Bernheim ? Et dans ce cas son usage thérapeutique relève-t-il du charlatanisme, comme lui reprochaient les Allemands ? Quels sont les critères de suggestibilité des personnes ? Quel est le rôle respectif de l'hypnotiseur et du patient dans la suggestion ? L'hypnose est-elle une méthode de guérison symptomatologique ou causale, provisoire ou définitive ? Quelles sont les causes de la résistance à guérir ? Quelle est la nature de la dépendance que le patient semble développer envers la méthode et celle des sentiments qu'il semble éprouver à l'égard du thérapeute ? Il est évident que ce sont les patients, et tout particulièrement les femmes appartenant à la très haute bourgeoisie financière juive de la Vienne fin-de-siècle, les principales clientes du jeune Freud, et notamment Anna von Lieben et sa parente Elise Gomperz qui lui fournirent les éléments de réponse empiriques et théoriques à ces questions et qui le firent évoluer vers sa propre déclinaison de l'hypnotisme – avec la découverte du mécanisme psychique de la dissociation mais aussi le maintien du divan, avec une attention accrue aux causes traumatiques infantiles plutôt qu'aux symptômes, avec la prise de conscience déconcertante et contre-intuitive que l'hypnose légère sans catalepsie ni amnésie était plus apte à atteindre ses objectifs que l'hypnose profonde... Évolution en trois temps : d'un suggestion impérative à une suggestion visant à l'oubli du trauma à un procédé inverse, consistant dans la conscientisation de celui-ci. Il en ressort l'image d'un jeune praticien qui apprend et qui se trompe, qui se passionne et qui doit batailler pour se faire une place dans un milieu hostile, qui s'impatiente contre ses clientes « nerveuses », richissimes et détestables, qui se surprend devant ses quelques succès « petits mais remarquables »...


Cit. :


1. « Informé par Freud des expériences de Charcot sur l'hystérie traumatique, Breuer a manifestement fait le rapport avec les états seconds et les narrations dépuratoires de Bertha [Pappenheim]. Dans les deux cas, on a affaire à des idées qui sont restées coincées dans une partie dissociée du psychisme, hors d'atteinte du "moi" conscient. Charcot pense que c'est parce que le choc traumatique a provoqué une hypnose et des autosuggestions correspondantes. Breuer pense plutôt que c'est parce que la personne était dans un "état hypnoïde" spontané qui l'a empêché de réagir à l'événement, de l'"abréagir". En tout état de cause, on comprend pourquoi Freud dit que la méthode de Breuer imite le mécanisme – le "mécanisme psychique" – de la formation des symptômes hystériques : l'hypnose permet de reproduire l'état hypnoïde et, à la faveur de cet état, de décoincer l'idée dissociée. » (p. 139)

2. « Depuis le début, Freud la [Anna von Lieben] met sous hypnose pour lui faire retrouver et revivre les traumatismes censés être à l'origine de ses attaques. Et Dieu sait s'il y en a, des traumatismes – autant que d'attaques et de visites à domicile ! Alors que les frustes hystériques de Charcot n'avaient subi qu'un seul traumatisme ou "shock nerveux", d'ordinaire de nature physique, Anna von Lieben en allègue littéralement des centaines, de nature essentiellement psychique. Ce sont des frayeurs, des hontes, des angoisses, des peccadilles sexuelles. À la grande surprise de Breuer et de Freud, certains de ces traumatismes remontent même à l'enfance. La quête psychanalytique des traumas infantiles est née de la phénoménale mémoire d'Anna von Lieben.
Et comme Anna est très spirituelle, "witzig", elle trouve toujours moyen d'expliquer l'émergence de tel ou tel symptôme à l'aide d'un bon mot. Si elle a une névralgie faciale, c'est parce qu'elle a reçu une insulte comme "un coup sur le visage". Si elle a une douleur cardiaque, c'est parce qu'un incident lui a "transpercé le cœur". Si elle a une hallucination où elle voit Breuer et Freud pendus à des arbres, c'est parce que tous les deux lui ont refusé de la morphine : "L'un est bien le pendant de l'autre !" Etc.
Le Jeune Freud prend tout cela très au sérieux et il en tire une théorie. Les symptômes de l'hystérie sont des "symbolisations" du trauma, dit-il, des métaphores ou conversions corporelles dont il convient de retrouver le sens littéral. » (pp. 162-164)

3. « Quand l'hypnose a été couronnée de succès, la pérennité de la guérison dépend des mêmes facteurs que pour une guérison obtenue par d'autres moyens. Si les manifestations n'étaient que les séquelles d'un processus achevé, la guérison sera durable ; si les causes responsables des symptômes morbides perdurent sans atténuation, la récidive est probable. En aucun cas l'utilisation de l'hypnose n'exclut le recours à d'autres thérapies […]. Dans toute une série de cas où les manifestations morbides sont d'origine purement psychique, l'hypnose remplit toutes les exigences d'une thérapie causale, et le procédé consistant à interroger et à apaiser le malade sous hypnose profonde s'accompagne alors la plupart du temps du plus éclatant succès. » (pp. 300-301)

4. « Ce qui intéresse principalement le médecin est dès lors de savoir dans quelles conditions les personnes sont suggestibles. En voici une énumération non exhaustive :
- L'augmentation de la suggestibilité s'installe spontanément en tant qu'état psychique anormal persistant – un cas de figure rare [cf. la théorie de Charcot].
- Elle survient parfois lors d'états affectifs ou sous l'effet d'une contagion psychique ; parmi les états affectifs concernés, il convient notamment de mentionner l'état de foi religieuse.
- Elle survient lors de l'hypnose profonde qu'on peut susciter en recourant à certaines méthodes.
La suggestibilité propre à l'état hypnotique se distingue par certains aspects de la suggestibilité survenant sous d'autres conditions. En effet, elle est générale, alors que tout autre accroissement de la crédulité se rapporte uniquement aux suggestions liées à la circonstance agissante. » (p. 305)

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