[Elégies pour le temps de vivre ; suivi de Dans les méandres des saisons | Richard Rognet]
Le temps à vivre
Placée sous le patronage de son éditeur, l’œuvre est dédicacée à Antoine Gallimard. Cela pourrait sentir le renvoi d’ascenseur par un groom des lettres mais dans les pages liminaires, trois superbes épigraphes de Francis Jammes, Robert Walser et Sandro Penna donnent le ton. Débutent ensuite les poèmes de Richard Rognet, sans titre, sans rime, emplissant les pages. Immédiatement, le lecteur pressent qu’il entame une œuvre bouleversante, d’une densité inouïe que la limpidité de l’écriture rend accessible et percutante sous le poli des mots. Le poète tout en retenue est lyrique, élégiaque sans lamento. Il use de l’anaphore en maître, place des enjambements et des rejets en fin limier, se pose aux lisières du monde, écoute l’indicible et met en correspondance le cosmos et le microcosme : « Le moindre détail découvert porte en lui les remous du monde ». Déjà la préface de Béatrice Marchal éclaire l’œuvre mais comme tout apparat critique, elle gagne à se lire en postface. Le volume n° 505 de la collection Poésie Gallimard paru en octobre 2015 assemble deux livres de poèmes liés entre eux, édités précédemment dans la collection Blanche : « Elégies pour le temps de vivre » (2012) ; « Dans les méandres des saisons » suivi de « Elle était là quand on rentrait » (2014). Les derniers poèmes consacrés à la mère défunte donne à sentir l’abîme de la perte et le vertige de l’oubli. Lus et relus sans en épuiser la quintessence, ils fouaillent le cœur et font invariablement couler les larmes de la compassion. Richard Rognet est un poète humble et immense : « le petit garçon accroupi se relève,/[…] il enjambe un ruisseau, s’arrête,/hésite avant d’entrer dans la cour/où sa maison paraît, au-delà de la vie ».
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