Comment fera Dastaguir le vieillard, avachi sur le bord d'une route aride dans l'attente d'un véhicule et accompagné de son petit-fils Yassin, à annoncer à son fils Mourad qui travaille à la mine, que les Russes ont bombardé leur village détruisant leur demeure, que tous les membres de leur famille ont péri sauf le petit devenu sourd : "La bombe était très forte. Elle a tout fait taire. Les tanks ont pris la voix des gens et sont repartis. Ils ont même emporté la voix de grand-père" (p. 45) ?
C'est la question que le narrateur lui pose en l'interpellant à la seconde personne.
Et le vieux de répondre avec ses cauchemars et ses images infernales davantage que par des mots.
Longue nouvelle (adaptée au cinéma comme le magnifique Syngué Sabour) de Rahimi que j'adore, dont la traduction sensible et poétique, donnant voix à l'étranger dans la mesure même où le confort du lecteur français peut en être bousculé par le dépaysement, rend justice au style inimitable de l'auteur, fait de concision et de répétitions, de rythme percutant, de phrases hachées, sèches, désertiques à l'image de la désolation des lieux et des hommes meurtris par les guerres.
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