L'écrivain argentin Enrique Medina a huit ans lorsqu'il est placé en maison de redressement par sa mère. Il y restera jusqu'à ses seize ans.
"Les tombes" est le récit de cette expérience. Une expérience de violence et de cruauté, qui demande, pour y survivre, de devenir soi-même dur et impitoyable.
Le roman est une description froide et minutieuse, en boucle, des sévices que les surveillants sadiques font subir aux pensionnaires en toute impunité, des coups, des viols et des brimades que les enfants s'infligent les uns aux autres. Car si les adultes sont tout puissants, dans cet univers où leurs hôtes n'ont aucun droit, une hiérarchie tacite mais incontournable régit les rapports entre les jeunes garçons. Les "merdeux" (les moins âgés) se soumettent aux diktats des moyens, eux-mêmes contrôlés par les grands. Les plus faibles, en fonction de leurs attraits physiques, deviennent des souffre douleur ou des objets sexuels.
Des liens se nouent aussi, parfois, comme ceux qui unissent le narrateur à Martinez, un adolescent tranquille mais qui en impose par son courage.
Peu à peu, le héros fait sa place dans cet enfer, apprend à encaisser comme à donner des coups, et parvient à acquérir le respect de ses camarades.
La narration de ce quotidien sordide de bagarres incessantes, d'humiliations récurrentes, est déroulée avec une sécheresse atterrante qui provoque chez le lecteur une répulsion à la limite de la nausée. On a l'impression que ces enfants vivent dans un monde à part, avec ses règles, qui les ampute de toute aptitude à la compassion. On a du mal à trouver attachants ces gosses violents, parfois vicieux, au comportement bestial, même si l'on est conscient qu'ils ne sont finalement que les victimes d'un système engendrés par la misère, et entretenus par des adultes eux-mêmes insensibles et pervers.
Un texte difficile, donc, même si le langage argotique du narrateur confère à l'ensemble une gouaille qui peut faire sourire...
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