[C'est l'opéra qu'on assassine! La mise en scène en question | Jean Goury]
Un excellent essai donnant un aperçu historique de la manière d'envisager la mise en scène d'opéra. On voit ainsi comment s'est produit le glissement, à partir de mises en scènes souvent inintéressantes et surannées, vers une nouvelle conception de la mise en scène où celle-ci prend le pas sur la musique, et va même souvent à son encontre.
Je suis à 100% d'accord avec Jean Goury sur le fait que dans l'opéra, c'est la musique et le livret qui doivent primer sur la mise en scène, dont le rôle doit vant tout être de servir et de magnifier la musique. Or la mode de recruter des metteurs en scène venant du théâtre dramatique, et ne connaissant que peu de choses de la musique classique, va à l'encontre de cette approche. Je fais justement partie de ces amateurs qui ont quasiment fuit Bastille sous l'air Mortier, lassée par des mises en scène confuses qui allaient à l'encontre de la musique et tuaient donc l'émotion. A priori c'était d'ailleurs le but recherché: faire fuir le public traditionnel - forcément "bourgeois et réactionnaire"! - pour le rajeunir et le renouveller. Sauf que toutes ces mises en scène indigentes n'aident pas à rendre les opéras accessibles aux néophytes non plus, puisque la trame narrative devient incompréhensible.
Mais ce qui est très drôle et surprenant, c'est que si je suis entièrement d'accord avec le fond (privilégier les mises en scène au service de la musique, sans forcément rechercher une lecture "politique" des livrets), je ne suis pas toujours d'accord avec les exemples concrets. Ainsi, j'avais adoré la mise en scène de Don Giovanni par Hannecke à Bastille en 2006, alors que Jean Goury la critique abondamment. Pour moi c'est un des très rares exemples où la transposition à une autre époque se justifiait pleinement et magnifiait le livret. Comme quoi, l'émotion ressentie à l'opéra est imprévisible et avant tout personnelle.
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