Jen Fellows alias Jennifer Blood mène une double vie depuis sa banlieue nord-américaine. Le jour, elle est mère au foyer, subissant les assauts et les saillies de son mari Andrew, la nuit, elle revêt sa tenue moulante en cuir et, après avoir endormi sa famille avec des somnifères, elle part dessouder le méchant mafieux. Jen tient un journal tandis que les épisodes défilent comme une éphéméride, du lundi au samedi, dimanche étant jour de relâche, les plombs ayant pété et la poudre parlé. Chaque jour révèle son lot de mises à mort avec un raffinement sadique tartiné de gore : têtes explosées, membres sectionnés, éviscération, noyade, etc. Gros calibre, gaz, seringue, hache, lance-flamme, Jennifer ne recule devant rien et nettoie le terrain avec une facilité qui frôle la routine et l’ennui. Elle se livre sans fard et finit par s’expliquer. Le lecteur comprend progressivement le motif de sa vendetta.
Novice, le lecteur pourra être décontenancé par le canevas convenu et l’accumulation de clichés. Les scènes gore ne relèvent pas le niveau. Trois dessinateurs se succèdent et n’emportent jamais l’adhésion tant les graphismes recèlent de maladresses quand les cadrages cafouillent. La mort des méchants n’est même pas plaisante à voir. En revanche, la bédé dégage un humour parfois involontaire. Le voisin libidineux de Jennifer, 100 % viande de beauf, est un premier choix dans les seconds rôles. Des ninjettes émanent aussi un pouvoir hautement comique, à se fendre la poire. Jennifer est une héroïne glauque, détachée, froide, schizophrène. Elle fait son boulot jusqu’au bout de l’ennui et ne s’arrête jamais, à la maison comme à l’extérieur, sans rêve, sans projet, sans désir.

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