J'avais entendu parler de ce livre à sa parution, mais sans avoir eu le temps de le lire. C'est fait aujourd'hui et je ne le regrette pas, car il date à peine.
En 1964, dans" Les Héritiers", en 1970, dans "La Reproduction", Bourdieu et Passeron développaient l'idée que l'enseignement avait pour fonction de reproduire les classes sociales. Enseignant le plus souvent l'anglais, mais parfois le français, Claude Duneton développe l'idée du caractère bourgeois de la culture littéraire, mais concrètement, dans un langage familier qui est pour beaucoup dans le charme de son livre, montrant comment cela peut inciter certains élèves à estimer que cet enseignement n'est pas fait pour eux, aujourd'hui que les élèves de tous les milieux sont contraints à suivre l'enseignement du collège. Mais il note avec honnêteté que c'est moins vrai pour des matières comme les mathématiques ou les sciences. Il souligne aussi le caractère artificiel de bien des exercices de littérature, et, au fond, de la situation scolaire elle-même. Il remarque également comment le changement des modes de vie a rendu beaucoup moins naturels le silence, l'attention, si nécessaires en classe. Il identifie déjà le problème sur lequel travaillera bien plus tard Jean-Yves Rocheix (je ferai prochainement une note de lecture sur son livre Le sens de l'expérience scolaire), le sentiment de trahir son milieu d'origine qui peut accompagner l'adhésion à une culture d'une certaine manière « étrangère ».
L'origine de ses réflexions : « … mon désenchantement grandissait. J'en avais de plus en plus marre d'enseigner... c'est parce que le métier me sortait par les pores... que je me suis mis à réfléchir. Et non l'inverse... ». Qu'on n'attende pas de lui des propositions alternatives : « … Parce que je ne crois plus à rien... »
En matière de pédagogie, sans doute. Mais son livre s'ouvre sur ces mots : « - Je voudrais qu'y ait la guerre... C'est Maud qui a dit ça, d'un air tranquille... » Et voici quelles en sont les dernières phrases : « … Elle avait peut-être raison Maud, avec ses envies de catastrophe, la guerre soudain qu'elle souhaitait... Peut-être qu'ils la feront un jour eux-même, pour se donner des sensations... la guerre... Ils s'amuseront bien : ils l'appelleront révolution. »
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