Roman de Marseille et de ses environs, de la fin de la première guerre mondiale, jusqu'à la fin de la deuxième, à travers deux familles dont le destin se retrouve lié, les de Portallan, vieille famille provençale de tradition agricole dont un rejeton se lance dans le commerce et l'industrie et "y perd son âme", les Monti-Barutti, immigrés italiens de la première génération.
On suit les soubresauts du développement industriel et du capitalisme ces années-là, les luttes syndicales, la façon dont la corruption mâtinée de pègre, fasciste et raciste, arbitre ces éléments.
Je n'ai pas pu le lire d'un oeil complètement objectif, tant le fait de voir des villes, des rues, parfois des paysages que je connais a pu créer pour moi un charme qui n'existerait peut-être pas pour ceux qui n'auraient pas cette expérience : je n'habite pas bien loin des terres des Portallan... Ceci dit, je dirai que j'ai trouvé le livre à la fois bien documenté et captivant aussi bien sur le fond que la forme et la peinture des sentiments des personnages ressort avec vraisemblance et justesse.
Je n'aurai qu'une critique, mais je la pose en bémol, car elle est fondée sur une impression qui n'est due peut-être qu'à un manque de culture sociale : on sent trop que le roman est écrit par un auteur du XXIème siècle, journaliste à
L'Express après l'avoir été au
Figaro, qui a vu les lieux tels qu'ils sont devenus et les faits tels qu'on les analyse aujourd'hui, aux prismes du néo-libéralisme, post-colonialisme, écologie, mondialisme, européanisme... Les analyses faites par les héros positifs ont des précisions de prophéties visionnaires : ils sentent déjà qu'on ne parlera plus que d'Europe "un jour", avec déjà un petit relent maastrichéen (très fort, ça, à l'âge du patriotisme guerrier colonialiste français), que Vitrolles sera un jour considérée comme la banlieue de Marseille alors qu'en 1918, quand St-Antoine (Marseille-Nord) même était de la garrigue abandonnée des dieux, et même en pleine industrialisation, c'était de la pure utopie, pas une perspective fondée.
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