Les romans de Deon Meyer valent bien plus que les titres racoleurs dont ils sont affublés et les quatrièmes de couverture qui finissent de bien mal les habiller. Le pic du diable ne fait pas défaut à la règle mais il est la traduction littérale du titre originel Devil’s Peak. D’une écriture limpide, les romans polyphoniques de l’écrivain sud-africain se lisent aisément. Ils s’écoulent en fluides arabesques telles les serpentines bleues des lacs de montagne. A mesure que le lecteur suit le fil de l’intrigue, il frôle, touche et s’immerge dans une mélancolie insondable, celle des destins brisés et des vies déchues. Christine, prostituée de luxe, dévide sa vie à un pasteur attentif. D’où proviennent sa peur viscérale et son désir morbide d’automutilation ? Thobela Mpayipheli voit son fils adoptif, Pakamile, tué par une balle perdue lors du braquage d’une station-service. Les deux petites frappes responsables s’enfuient. Quel sens Thobela va-t-il donner à son combat contre les bourreaux d’enfants ? L’inspecteur Benny Griessel a sombré dans l’alcoolisme. Il vient de frapper pour la première fois sa femme Anna. Rejeté de chez lui, comment va-t-il pouvoir remonter la pente alors que le cri des mourants qu’il côtoie dans ses enquêtes criminelles le hante et le terrifie ? Les paragraphes alternent la vie des trois protagonistes à travers trois grandes parties intitulées sobrement « Christine », « Benny » et « Thobela ». Le fil directeur n’est jamais brisé. A mesure, on pénètre dans leurs existences rompues. Certaines trajectoires semblent se redresser. Une lumière paraît clignoter dans le désert infini et obscur d’une solitude viscérale mais la rechute guette. Comment les trois destins vont-ils se rejoindre ? Le suspense va crescendo à mesure que le lecteur entre plus profondément dans la vie des personnages. L’être humain apparaît dans toute sa complexité, sa finitude et sa soif d’absolu et le lecteur pleure parfois de concert dans « ce cœur qui s’écœure ». « Quoi ? Nulle trahison ! Ce deuil est sans raison » comme le chantait si bien le poète saturnien Paul Verlaine.
----
[Recherchez la page de l'auteur de ce livre sur
Wikipedia]
Afficher toutes les notes de lectures pour ce livre