Un livre curieux de Anthony Burgess. Il prend comme point de départ le livre de George Orwell 1984. Mais avant de pouvoir savourer le roman il faut se "taper" un pensum de 125 pages en forme d'auto-interview où Burgess explique la génèse de son oeuvre. Selon Anthony Burgess , Orwell n'a pas cherché bien loin son modèle d'état totalitaire ; 1984 était déjà dans 1948 (la date où le livre a été écrit ). La Grande Bretagne de 1948 avec les germes du futur "welfare state", ses syndicats entreprenants, ses classes populaires marquées, offrait déjà à Orwell un bon exemple d'état totalisant (j'ai pas dit totalitaire...).
Le roman (en fait une longue nouvelle) de Burgess , met en scène (donc en 1985) un rebelle qui s'oppose aux syndicats omniprésents. La Grande Bretagne est donc sous la férule des syndicats qui ont pris la place de Big Brother. Seul le travail "utile" est authorisé. Le héros , ancien prof, est contraint de se faire...confiseur ; des jeunes au chomage (clones de ceux d'Orange mécanique, rançonnent les passants pour pouvoir s'acheter des livres de philosophie grecque, la Divine Comédie, le théatre de Shakespeare, où , why not, La princesse de Clèves....Et bien sûr , sur tout cela règne la novlangue ; il faut parler "popu" puisque le "peuple" a pris le pouvoir.
Ce livre est le résultat d'un ressentiment, me semble-t-il ; écrit en 1978, Burgess constatait les "dégats" (notez les parenthèses) des grèves à répétition qui assombrissaient l'économie anglaise (cela devait se passer sous les travaillistes Wilson ou Callaghan ?!?). Il aurait du attendre un peu, en 80 Maggie se chargera de faire entrer la Grande Bretagne dans la merveilleuse post-modernité...
Et pourtant Burgess, malgré ce coté un peu réac, manie pas mal d'idées, de concepts,interressants. Il se livre au petit jeu de prédiction qu'ont affectionné d'autres écrivains. Hélas même si parfois il tombe juste, beaucoup d'anticipations font "plouff".Il prédisait notamment la main mise des arabes (ceux du Golfe...) sur toute l'économie anglaise (crise de 1973 pas loin). Par contre il n'a pas prédit la crise de 2008...
S'il fallait retenir une morale de ce livre ce serait peut-être simplement l'illustration du combat toujours réactualisé de l'homme seul contre "la masse". L'individualité contre la totalité. Le droit à l'inutile .
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