Depuis soixante-dix ans, ces enfants du désastre se taisaient. En six mois, pourtant, ils ont connu la défaite de leurs pères, le désarroi des familles, l'inquiétude de leurs mères, le désordre général, la débâcle. Ils sont partis vers l'aventure forcée dans toutes sortes d'équipages, parfois apeurés, le plus souvent excités, désorientés par la dilution soudaine de toutes les autorités mais cherchant à sauver leurs études : où passer le brevet et le bachot ? Au fil de leurs pérégrinations, ils vont découvrir les ponts coupés, l'ennemi qui tombe du ciel en les mitraillant, mais aussi l'aventure, la campagne profonde. La voix chevrotante de Pétain leur annonce la fin de leur France, de leur enfance. Leurs parents leur avaient parlé des Boches, ils voient arriver les Panzerdivisions de Hitler. A la rentrée 1940, ces adolescents font connaissance avec les restrictions et on les appelle les J3, en référence à leur carte d'alimentation. En zone dite " libre ", ils doivent sans cesse saluer le drapeau tricolore, défiler, chanter la gloire du Maréchal. En zone occupée, tout est interdit, le drapeau, la Marseillaise, s'assembler à plus de trois, courir dans la rue... Mais ce sont eux, les lycéens, qui vont organiser à Paris la première manifestation de résistance, le 11 novembre 1940. |