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[Contribution à l'émergence de territoires libérés de l'...]
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Posté: Hier, à 22:09
MessageSujet du message: [Contribution à l'émergence de territoires libérés de l'...]
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[Contribution à l'émergence de territoires libérés de l'emprise étatique et marchande | Raoul Vaneigem]

Le cofondateur de l'Internationale situationniste, auteur du célèbre _Traité de savoir-vivre à l'usage des jeunes générations_ (1967) et d'une cinquantaine d'ouvrages historiques et philosophiques parus jusqu'à nos jours, livre dans cet essai une critique extrêmement actuelle et pertinente du capitalisme dans sa version consumériste et spéculative, du travail dévalorisé et parasitaire, du simulacre démocratique vidé de valeurs et d'idéaux, et d'un État réduit à sa fonction uniquement répressive dépourvue de tout horizon d'émancipation du citoyen. En même temps, il envisage la sortie par épuisement d'un tel système, non par une révolution mais par la construction progressive de zones d'« autogestion de la vie quotidienne », s'inspirant notamment des territoires contrôlés par les zapatistes au Mexique et des ZAD en France et en Europe. La réappropriation de ces espaces présuppose une métamorphose profonde de la conscience individuelle des adhérents, qui doivent pouvoir s'affranchir du miroir aux alouettes de la marchandise et de l'argent (de « l'avoir »), au nom d'un récupération roborative de l'« être », c-à-d. de leur pulsion de vie, de jouissance, de symbiose avec la nature, afin de restaurer leur subjectivité mise à mal par le fétichisme et d'entreprendre de « devenir humains ». Créativité au lieu de la contrainte du travail (la « survie »), intelligence sensible au lieu de l'intellectualité, émancipation et autocorrection des ses erreurs au lieu de l'instruction dans l'éthique de la culpabilité, commune au lieu du communautarisme, autodéfense et contournement au lieu de la lutte armée, « prééminence acratique de la femme » au lieu du féminisme, et dans tous les cas le choix de la vie au lieu de celui de la mort... voilà résumé, en quelques dichotomies antagonistes, la ligne programmatique de cette « mutation de civilisation » appelée de ses vœux par Vaneigem. S'agit-il d'une nouvelle version de déterminisme historique post-capitaliste ? L'auteur ne cède pas à l'apocalyptisme, qu'il considère comme un piège du consumérisme lui-même. Il admet que la fin de ce dernier pourrait entraîner quelque chose de pire encore que ce que nous vivons présentement. Ma dernière cit. me semble suggérer implicitement l'hypothèse que, par-delà l'optimisme contenu dans son exhortation vitaliste – le « réveil de la volonté de vivre » – et son appel au « retour de la conscience humaine », le surgissement des zones d'autogestion de la vie quotidienne, leur diffusion à large échelle et surtout leur pérennité malgré la violence organisée de l’État relèvent surtout de l'utopie... Toutefois, je trouve particulièrement intéressant et également d'une grande probité de ne pas s'arrêter à « un cahier de doléances énumérant les conditions déplorables qui nous accablent » (p. 75) dès lors que l'on s'oppose à une vision apocalyptique du vieux monde.
Enfin, personne ne peut rester indifférent devant la beauté flamboyante de la prose de Vaneigem.



Table [avec appel des cit.]

Au-delà de la mêlée

1. État des lieux :

- L'économie divinisée et le règne des mafias affairistes
- La gouvernance de l'absurde et de l'inhumain résulte d'une économie de pillage qui fait de l'appât du gain le principe de toute relation sociale
- Comment en sommes-nous arrivés à un tel degré de délabrement planétaire ? [cit. 1]
- La colonisation consumériste
- Le capitalisme spéculatif et financier
- La déperdition de la valeur d'usage, le parasitisme lucratif et l'excroissance du secteur tertiaire raréfient le travail utile au profit du travail parasitaire
- L'apocalyptisme et l'hédonisme des derniers jours [cit. 2]
- L’État de bien-être – le welfare state – a été le dernier mensonge d'un capitalisme encore censé améliorer le sort des hommes et des femmes
- Le capitalisme financier n'a plus besoin de dissimuler sa main de fer sous le gant de velours de l'humanisme. Pourquoi les prétendus décideurs se priveraient-ils d'étaler sans scrupules leur arrogance ? Le cynisme du fait accompli leur suffit
- Le chaos est un objectif politique. Les gestionnaires du vide cultivent le désordre pour imposer un ordre lucratif

2. Heurs et malheurs de la conscience prolétarienne :

- Le fétichisme de l'argent déshumanise les relations sociales et entraîne une déperdition de l'intelligence sensible
- Régressions épisodiques et résurgences du conservatisme [cit. 3]

3. Archaïsmes et nouveautés dans la diversité des luttes :

- L'imposture intellectuelle [cit. 4]
- Le militantisme est un produit de l'intellectualité [cit. 5]
- Démanteler le mur de lamentations que l'économie parasitaire consolide avec le ciment de notre désespoir

4. La société change de base : Ce qui est en cours sous nos yeux n'est rien d'autre qu'une mutation de civilisation

- Au carrefour de partout et de nulle part se situe la croisée du possible et de l'impossible
- Le retour de la conscience humaine
- La robotisation du vivant ne survivra pas au réveil de la volonté de vivre

5. Retour à la base :

- Reconstruire notre unité
- L'ère du dépassement [cit. 6]

6. L'autogestion de la vie quotidienne et l'apprentissage d'un style de vie :

- Ôter toute ambiguïté à la notion d'autogestion
- La renaissance qui s'annonce aujourd'hui est aux pulsions de la vie ce que la Renaissance des XVe et le XVIe siècles fut à l'humanisme émancipateur
- S'éveiller à la conscience humaine, c'est renouer avec une évolution de la femme et de l'homme que la civilisation agro-marchande continue d'entraver et de dévoyer [cit. 7]

7. L'autogestion de la vie quotidienne et les résurgences du passé :

- Recueillir pour le réinventer l'héritage du passé
- Rigueur et fluidité en démocratie autogérée
- Reconsidérer les notions de majorité et de minorité sous l'angle du quantitatif et du qualitatif
- Commune contre communautarisme [cit. 8]
- L'autodéfense et la lutte armée
- Pour pénétrer dans le camp des insurgés, l'ennemi ne dispose pas de meilleures brèches que le pouvoir, l'appropriation, la manipulation, le chantage qui s'y perpétuent
- La justice et le désengorgement des conflits [cit. 9, 10]
- Une société sans argent
- Prééminence acratique de la femme

8. Que croissent et multiplient les terres affranchies de la tyrannie étatique et marchande ! :

Addendum (chanson : « Terre libre »)



Cit. :


1. « Lorsqu'il s'avère que l'économie de consommation offre une plus grande rentabilité que le secteur productif – toujours en butte aux revendications de salaire, aux grèves, aux luttes sociales –, on assiste à un désintérêt croissant du capitalisme pour la course à la productivité. Le dynamisme des entreprises s'essouffle, les usines sont fermées en dépit des sommes considérables que l’État accorde aux patrons, en échange d'une modernisation qu'ils n'ont aucune intention d'assurer. On assiste à l'abandon graduel du secteur primaire : métallurgie, textile, mines, transport, logement, agriculture de qualité, infrastructures sanitaires et scolaires. La marchandise elle-même subit une transformation qui devrait susciter l'indignation et recueille au contraire un assentiment tacite : la valeur d'usage tend vers zéro et la valeur marchande vers l'infini. En d'autres termes, une paire de chaussures est convoitée davantage en raison de son prix, dont le degré est le garant d'une représentation sociale affichée, que par l'usage qui en est fait, à savoir assurer durablement le confort du pied. Ainsi est-il loisible à chacun de prendre conscience que la valeur spectaculaire est une valeur marchande. » (pp. 24-25)

2. « En devenant la principale source de profit du capitalisme, le consumérisme a réhabilité un hédonisme qui avait mauvaise réputation. Bien qu'ils s'y adonnassent avec autant d'hypocrisie que de vulgarité, les maîtres, les patrons, les exploiteurs, les notables tenaient les plaisirs en discrédit pour la simple raison que les affaires sont prioritaires et cautionnent le caractère sérieux de leur réputation. Quant au prolétariat, il assimilait volontiers la jouissance à un privilège de bourgeois.
Réduits jadis à des défoulements hygiéniques, qui lubrifiaient la machine à produire, les plaisirs se sont trouvés enrôlés dans les grandes manœuvres de la séduction consumériste.
Dans le sillage des mafias narcopharmaceutiques en plein essor, les recettes et les pronostications de bien-être font florès. Le bonheur participe désormais d'un engouement forcé, d'un programme de rentabilité. La vie à l'envers a besoin d'emplâtres qui enrichissent le marché des thaumaturges.
En entreprenant de dévitaliser la terre et ses habitants, le capitalisme ne dissimule nullement son programme de paupérisation accélérée. Il n'a aucun scrupule à s'adresser aux consommateurs, guettés par l'endettement, en leur déclarant cyniquement : "Jouissez d'aujourd'hui, car demain sera pire !" Il mise sur la peur, sur le désarroi, sur l'imminence fantasmatique d'une apocalypse pour programmer un "hédonisme des derniers jours" qui lui permet de ratisser les fonds de poches des futurs chômeurs. » (pp. 30-31)

3. « On voit resurgir comme un tombereau de fumier sur une autoroute les pires relents de l'intégrisme religieux, le nationalisme, la misogynie, l'homophobie, le virilisme et le féminisme, son adversaire et son inséparable compagne.
Percluses d'échecs, de déconvenues, de trahisons, de faux-semblants, les grandes idéologies politiques, objets de tant de luttes et de tant d'enthousiasmes sanglants, se sont effondrées sous le poids de leur discrédit. Libéralisme, socialisme, communisme, fascisme avaient pourri de l'intérieur. L'engeance politique se mit alors à l'école des techniques publicitaires que les campagnes de promotion commerciale avaient portées à une redoutable perfection. Les représentants du peuple apprirent ainsi à vendre leurs marques et leurs produits sans se soucier de leur contenu. Le clientélisme réduisit ce qui restait des idéologies à des outres vides, que les tribuns s'appliquent à gonfler hâtivement de leurs flatulences.
L'avant-scène du spectacle réclame sans cesse d'éphémères bouffonneries. Les restes du socialisme trempent dans la soupe néolibérale, le conservatisme se prend les pieds dans le tapis troué du néofascisme, les rétrobolchéviques en sont encore à célébrer l'ouvriérisme alors qu'il s'est, pour une bonne part, égaré dans les égouts de la xénophobie et du racisme. » (pp. 50-51)

4. « Cette pensée séparée [de l'esprit vs. la nature], cette 'intelligence intellectuelle', est à la solde de l'économie, même quand elle entreprend de la combattre et de dénoncer sa réalité spectaculaire. C'est un propos maintes fois répété que "ceux qui parlent de révolution sans se référer à l'amour et à leur propre vie quotidienne ont dans la bouche un cadavre", mais on n'en a guère tiré les conséquences. Au délire des mots et des symboles, nous voulons opposer 'l'intelligence sensible' d'une vie qui prend conscience de sa richesse et entend dépasser la survie à laquelle se réduit l'existence ordinaire.
Le danger que présente l'intellectualité tient à la volonté de pouvoir qui lui est inhérente. L'intellectuel est un détenteur d'autorité. Il règne sur la matière brute. Il la façonne. Il ne l'affine pas. Si conciliant voire si déférent qu'il se montre envers elle, il ne laisse pas de perpétuer la hiérarchie qui assure le prééminence du travail intellectuel sur le travail manuel. Il possède la capacité d'organiser, il n'a aucun sens de l'art d'harmoniser. » (pp. 61-62)

5. « Il existe une jouissance inhérente à la quête du vivant. Ce qui la qualifie à bon droit de jouissance insurrectionnelle c'est l'incompatibilité absolue de sa gratuité avec un système fondé sur le profit. On ne le dira jamais assez : l'économie marchande est un crime contre la vie.
La jouissance des êtres et des choses révoque leur appropriation. La quête du vivant est l'art d'être conquis par les dons du cœur et de la terre. L'aberration qui a livré les conceptions de Marx à l'idéologie (dont il se méfiait par ailleurs) a été de n'avoir pas vu dans le travail d'exploitation de la nature la cause de notre aliénation ; plus dramatiquement encore, d'avoir identifié le travail à un processus d'humanisation de l'homme et de la femme. » (p. 70)

6. « Il suffirait que le travail ne soit que l'obligation de gagner son pain à la sueur de son front pour le qualifier de malédiction. Mais la désastreuse invention du travail est bien antérieure à la repoussante injonction évangélique. Imputer l'activité laborieuse à une disposition naturelle de l'homme et de la femme est un double mensonge :
Primo, les civilisations de la cueillette, antérieures au règne de l'agriculture patriarcale, ont, entre autres libertés, celle d'ignorer le travail. Les communautés recueillent les dons de la nature, les affinent et en jouissent en jouissant de la vie (comme le montre Marshall Sahlins dans _Âge de pierre, âge d'abondance_).
Secundo, le travail n'a pas pour utilité fondamentale d'aider les peuples à assurer leur subsistance. La quête du quignon de pain passe par la quête de l'argent qui permet de l'acheter. Or, la valeur d'usage de l'argent est accessoire en regard de sa valeur d'échange, dont la croissance fait enfler, aux dépens de l'être, les deux mamelles de l'avoir : profit et pouvoir.
L'effort n'a ni le même sens ni la même substance s'il m'est imposé ou s'il procède de l'affinement de mes jouissances. Les exigences de mon plaisir n'ont rien en commun avec les objurgations de l'ascétisme, du sacrifice, de la contrainte, des obédiences, du devoir. Si tatillon que soit l'exercice de la création, il en résulte toujours, comme par l'effet d'une grâce acquise, une sensation et une conscience de vivre, qui expulsent se mes préoccupations cette efficacité laborieuse toujours à l'affût de dessécher et de stériliser ce qu'elle touche. » (pp. 98-99)

7. « Il ne s'agit de rien de moins que de remettre en œuvre l'évolution de l'homme vers l'être humain. Annihiler la société hiérarchisée, autoritaire, patriarcale, qui nous a pris au piège de l'antiphysis, n'est qu'une incidence de ce que nous voulons construire.
[…]
En revanche, la perception d'un projet diffère du tout au tout si son angle d'approche est celui du paysan zapatiste, de l'occupant d'une libre terre, de quiconque se laisse guider par la curiosité et retrouve l'innocence de l'enfant, affranchi du carcan scolaire. Il y a une envie irrépressible d'apprendre, d'enseigner, d'innover dans la passion tranquille mise à cultiver le potager collectif, à construire un habitat en toute fantaisie, à expérimenter à la pointe du désir l'espace et le temps où s'inaugure une aventure sans pareille. La vie est le 'genius loci' d'un univers où la pensée et les gestes ouvrent à une dimension "galactique".
[…]
Local et global découvrent leur coïncidence. La perspective de la vie est une vision universelle. En d'autres termes, fertiliser un bout de terrain et un coin de pensée, au profit de soi et de tous, contribue à jeter à bas le Léviathan plus sûrement que le rage et le désespoir. Il y a dans la simplicité du retour à la base une puissance poétique qu'aucun pouvoir n'est à même de réprimer. » (pp. 124-125)

8. « Qu'est-ce que la commune ? Une société où j'ai à chaque instant le choix de me construire avec ou sans elle. Je puis préférer m'isoler et ne rencontrer personne, mais je sais que ma solitude n'est pas un esseulement. Ne désirant d'autre secours que de moi-même, je suis environné de compagnes et de compagnons qui disposent du même choix, de la même liberté.
[…]
[…] Aucun jugement, aucune mesure, aucun chantage affectif ne [me] met en demeure de rendre des comptes, comme il en va dans les conglomérats communautaristes. Sectes, mouvements religieux, factions politiques, groupements tribaux, ethniques, nationalistes fonctionnent sur un principe d'adhésion mystique, de ralliement hystérique à une croyance, à une foi, à un concept fantasmatique.
[…]
L'effondrement des valeurs anciennes – patriarcat, autorité, discipline militaire, célébration du sacrifice – a permis que se dégage de la nuit et du brouillard suscités par leur chute une reviviscence de ces aspirations humaines que les assauts de la barbarie n'ont jamais entamées durablement : solidarité, entraide, alliance avec la nature, autonomie, gynocentrisme. Elles annoncent une société nouvelle, promise à bouleverser, par des changements hier encore inconcevables, la psychologie, la physiologie, l'intelligence d'une espèce que nous serons enfin en droit de qualifier d'humaine, sans sarcasme ni réticences. » (pp. 135-137)

9. « La vieille société est fondée sur un principe de culpabilité. On ne travaille jamais assez, on ne se sacrifie jamais assez, on ne s'échange jamais assez. Le système économique ne survit qu'au prix d'une transfusion de la force de vie en force de travail. Nous sommes tous coupables de ne pouvoir et de ne vouloir acquiescer à un sacrifice absolu. C'est pourquoi nous tombons sous la loi du sacrifice relatif, d'un sacrifice raisonnable. Il faut, pour préserver l'efficacité laborieuse, survivre et non mourir, agoniser, non se suicider. Aux yeux impitoyables de la légalité économique, nous sommes tous des criminels-nés.
La faute est inhérente à l' 'être' qui répugne à se transformer en 'avoir', à l'enfant, à la femme, à l'homme que leurs pulsions de vie induisent – selon l'ignominieuse expression évangélique – "en tentation". Car jamais ils ne consentent du fond du cœur à se métamorphoser en marchandise. Aucun sujet ne se satisfait d'être objet.
Le châtiment précède la justice. Il n'y a pas d'innocents aux yeux du pouvoir, des magistrats, des policiers. La condamnation est un préalable. […] Sous la vertueuse indignation s'abritent et se dissimulent sans scrupule le magistrat et l'argousin qui se sont introduits chez l'enfant par la porte de l'éducation. Comment les en chasser ? Le fouet de l'éthique révolutionnaire n'est-il pas lui-même un instrument d'autorité ?
Leur intrusion a dénaturé et nié une aspiration humaine à l'innocence qu'il nous appartient de libérer et de rétablir dans ses droits. Qu'y avait-il à la racine du désir de justice, qui a fomenté tant de mouvements insurrectionnels ? Le refus viscéral d'être réifié. » (pp. 154-155)

10. « Un phénomène, en revanche, mériterait d'attirer l'attention. Bon nombre de jeunes gens quittent les communautés zapatistes pour gagner les États-Unis, où tournicote frénétiquement le miroir aux alouettes du consumérisme. On observe la même addiction chez les migrants, fuyant la misère et la guerre. En France, en Grèce, en Espagne, la plupart préfèrent à l'entraide, proposée par les collectifs libertaires, les ZAD et les terres libres, les affres d'un périple qui les enverra croupir sur les amas d'ordures d'un fantasmatique Eldorado.
Incriminer de pauvres hères ensorcelés par la verroterie des nouveaux négriers, n'est-ce pas se dérober à une évidence, plus difficile à admettre, qui est celle-ci : tant que nos microsociétés en gestation n'auront pas atteint à un dépassement du consumérisme et de sa fabrique de faux désirs, l'absence d'attraction passionnelle ne laissera à la grisaille quotidienne que le choix d'une misère coloriée de neuf. » (p. 162)

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