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[Où on va, papa ? | Jean-Louis Fournier]
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Franz



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Posté: Mar 04 Nov 2008 17:41
MessageSujet du message: [Où on va, papa ? | Jean-Louis Fournier]
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Les livres prennent parfois d’obscurs chemins pour venir jusqu’à nous et réveillent en passant des souvenirs sombres. Le samedi 26 juillet 2008, nous étions un petit groupe autour du conférencier Bertrand Beyern pour une visite du Père Lachaise « insolite et secret ». Il est impossible de se lasser du grand cimetière de l’Est parisien et le spécialiste du lieu est féru et passionnant. Frôlant la tombe de Pierre Desproges, j’apprends que ses cendres ont été répandues devant sa pierre funéraire et que le fameux télégramme annonçant sa mort le jour dit, « Pierre Desproges est mort. Etonnant, non ! », a été rédigé par son ami Jean-Louis Fournier. Bertrand Beyern qui est aussi membre d’un jury de l’humour noir me glisse que Jean-Louis Fournier va faire paraître à la rentrée un livre qui ne sera probablement pas relayé par les médias mais qui va se propager de bouche à oreille avant d’être reconnu. Il ne s’est pas trompé d’un iota. « Où on va, papa ? » a suivi cette trajectoire souterraine pour devenir un best seller et être récompensé du prix Femina. Le livre mérite-t-il un tel engouement ? Probablement si on songe avec quelle délicatesse et quelle pudeur, sur un sujet aussi personnel et douloureux, Jean-Louis Fournier expose sa vie familiale. Sous sa plume légère et teintée d’humour, il parle de ses enfants, Mathieu et Thomas, handicapés physiques et mentaux. Il entame son monologue sous forme de lettre adressée à ses fils : « Souvent, je ne vous supportais pas, vous étiez difficiles à aimer. » Rapidement, au lieu de se lamenter, il enchaîne : « …pendant de nombreuses années, j’ai bénéficié d’une vignette automobile gratuite ». Le ton est donné. Il y a ce que le père n’aura jamais pu dire à ses enfants et l’évocation brève, en courtes scénettes, de la vie passée avec eux. Par la retenue de l’auteur, les sentiments et les enfants ont une présence et une force accrues. Parfois, on serre les dents pour ne pas pleurer et on remercie l’auteur de nous faire sourire malgré tout car ses mots insolents sont en vis-à-vis de l’ironie du sort : « Quand on leur met le corset [orthopédique]… Le soir, on a besoin d’une clé à molette pour les déshabiller. Quand on retire leur cuirasse, on remarque, sur leur torse nu, des traces violettes que l’armature en métal a laissées et on retrouve deux petits oiseaux déplumés qui tremblent ». Parfois, c’est plus fort que lui, Jean-Louis Fournier ressasse et dresse la litanie de tout ce qu’il ne fera jamais avec ses enfants : « Le paysage est d’une beauté indicible. […] De ces grandes joies-là qui aident l’humanité à vivre, ils vont être privés aussi. Il leur reste les frites. Ils adorent les frites, surtout Thomas, il dit « les fites ». La vie suit quand même son cours tortueux. Le couple se sépare. Les enfants vieillissent dans des corps chétifs et scoliosés : « […] à quatorze ans ils en paraissent sept, ce sont des petits lutins. Ils ne s’expriment pas en français, ils parlent le lutin… ». Puis une opération est tentée pour « redresser » Mathieu : « Elle est tentée, il est totalement redressé. Trois jours plus tard, il meurt droit ». On en est au milieu du livre. Un jour, Pierre Desproges accompagne Jean-Paul Fournier dans l’établissement spécialisé où se trouve Thomas. Il est bouleversé. A cet instant de la lecture, j’ai été ramené à l’hôpital du Mans en 1987. Je venais de rendre visite à mon premier bébé qui allait bientôt finir son voyage au bout de la nuit. Elle s’appelait Céline et n’avait plus que quelques jours à vivre. Un chromosome surnuméraire avait embouti son corps et son cœur. J’étais hébété et tournais en boucle dans les rues du Mans puis je suis tombé sur une affiche du festival du rire. Pierre Desproges donnait le soir même une représentation. Durant tout le premier quart d’heure du one man show, j’ai failli mourir de rire. A mesure qu’il se « psychanalysait » en public, il me tirait vers le jour. C’est peu dire que le livre à des résonances ! A la question posée sans relâche par Thomas au début du livre : « Où on va, papa ? », Jean-Paul Fournier répond à la toute fin : « Ma route se termine en impasse, ma vie finit en cul-de-sac » et moi je remercie l’auteur pour le surplus d’humanité qu’il apporte au monde.

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