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    Répondre au sujet L'agora des livres Index du Forum » Littérature générale    
[Lucien Leuwen | Stendhal]
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Swann




Sexe: Sexe: Féminin
Inscrit le: 19 Juin 2006
Messages: 2643


Posté: Sam 11 Aoû 2007 11:39
MessageSujet du message: [Lucien Leuwen | Stendhal]
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Lucien Leuwen, fils d'un riche papa banquier parisien, qui lui assure le gîte et le couvert ainsi qu'une grande protection car son esprit de plaisanterie autant que son entregent sont craints, est chassé de l'École Polytechnique pour être soupçonné de républicanisme (oh, pas très activiste, comme on le verra), ce qui n'est pas admis sous Louis-Philippe, évidemment.
Soudain piqué de ne rien devoir qu'à ce père-là, Lucien a la velléité de se lancer dans une carrière : ce sera lieutenant des lanciers, à Nancy. Évidemment, Nancy, sa ville et son œuvre, donnent lieu à des pages cruelles, pour justifier, sans doute, que notre lieutenant, désespéré de s'ennuyer le soir chez lui parce qu'aucun républicain (qu'il renie tant et plus) ou "juste-milieu" ne lui paraît assez bien pour son auguste personne habituée au bon-bec de Paris, se mette à courtiser le milieu ultra de Nancy ; cela ne l'empêchera pas de rire sous cape des ridicules (que je n'ai pas toujours perçus) des uns ou des autres, censés être fréquentables et pourtant décrits comme ennuyeux, stupides et ridicules. En ce cas, je n'ai pas compris l'intérêt de piétiner ses sympathies républicaines jusqu'à s'abaisser à fréquenter ces légitimistes snobs et leurs curés intégristes, si c'est pour aboutir à un ennui équivalent à celui des autres "salons". D'ailleurs notre soldat paraît plus occupé à Nancy à faire le caniche devant les comtesses qu'à son emploi militaire ; on a l'impression que monter à cheval en uniforme lui sert surtout à aller frimer sous les fenêtres de Mme de Chasteller, d'abord parce que celle-ci a eu le malheur de rire un jour où il est tombé de cheval, ensuite parce qu'il se dit (hou la la, pas tout de suite, ça serait trop simple !) qu'il en est amoureux.
A partir de là, de crainte que le livre ne me tombât des mains, je me suis mise à le lire au 2ème degré à Chantereine et Flèche, pliés de rire, devant les chassés-croisés et les cours-après-moi-que-je-t'attrape interminables, les dialogues sans intérêt rapportés presque en temps réel entre les amoureux qui se battent froid ou se font des déclarations ébouriffantes (ainsi Mme de Chasteller tombe-t-elle malade de s'être déshonorée en demandant à Lucien... ce qu'on pouvait dire de mal d'elle : c'est-y pas digne d'une catin, ça ?). La pauvre riche veuve ultra, parfaitement libre de son cœur, a des scrupules qui la feraient bombarder de tomates par la princesse de Clèves elle-même, je crois.
Quant à Lucien, il finit par partir en courant de Nancy, rejoindre avec soulagement Paris et réclamant, avec une suite dans les idées qui m'échappe, à son père un emploi administratif dans un Ministère avec le but avoué de devenir un parfait fripon, à condition (on a sa délicatesse, m*rd* !) de n'avoir à provoquer la mort de personne ! Là où je ne comprends pas, c'est que tous les tripotages proposés ensuite par son Ministre (étouffer une bavure, acheter des voix aux élections...) sont refusés puis négociés avec des hauts-le-cœur de franciscain et des pudeurs de rosière.
Permettez-moi d'arrêter là le résumé (il faut toujours l'arrêter avant la fin) : d'abord il n'y a pas grand'chose à dire d'intéressant de cette deuxième moitié, dont je ne voyais plus la fin et qui, lorsque j'ai eu le malheur de la lire à la fin d'un repas en position allongée m'a immanquablement conduite au sommeil (Flèche s'est assez moqué de moi à ce sujet) ; ensuite, le récit minutieux des magouilles dans lesquelles Lucien se voit obligé de tremper le moins possible de lui-même est fait pour lui-même, sans intérêt dramatique.

Je me suis dit plusieurs fois en lisant : "Ce n'est pas possible ! c'est un premier jet sur plusieurs mois, et jamais relu ! Stendhal ne m'a jamais autant barbée !"
Ce qui me le faisait dire, c'était l'incohérence des actions, des caractères peints, les ellipses et allusions pas explicitées. Qu'il y ait contradiction entre caractère et action, évolution psy d'un personnage n'a rien que de très naturel... et talentueux. Le problème est cette impression que non seulement ça n'est pas fait exprès, mais même que ça a complètement échappé à l'auteur, comme s'il avait perdu de vue l'intégralité de sa construction... ou pas relu, pas mis en forme.
Du coup, je me suis infligé la préface de Claude Roy pour en avoir le cœur net : eh oui, le départ du récit est un manuscrit raté d'une copine, Mme Gaulthier, qu'il a entrepris de corriger, puis transformer, et il n'a pas achevé ce travail. Du fond de tiroir, c'est bien ce que je pensais. Dommage.

Challenge MEP 2007

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Dernière édition par Swann le Sam 12 Déc 2009 19:31; édité 3 fois
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Auteur    Message
C-Maupin




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Posté: Sam 11 Aoû 2007 20:29
MessageSujet du message:
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Des goûts et des couleurs....Lucien Leuwen est le roman de Stendhal que j'ai préféré, parmi les trois que j'ai lus (Le rouge et le noir que j'ai beaucoup aimé et la chartreuse de Parme qui m'a paru insupportable). Il est vrai qu'il est considéré comme "le plus balzacien" des romans de Stendhal, et que j'aime beaucoup plus Balzac que Stendhal.
Je l'ai lu il y a très longtemps (peut-être quinze ans, ou plus) et je ne peux donc entamer une discussion (il faudrait que je le relise et avec tous les rings qui vont me parvenir...). Tout ce que je puis dire, c'est que j'avais apprécié la description de la bougeoisie de province, la relation des manoeuvres politiques et électorales, et la place relativement moins importante de l'intrigue amoureuse, par rapport aux deux autres romans que j'ai cités.
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Auteur    Message
amiread1



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Posté: Dim 12 Aoû 2007 2:56
MessageSujet du message:
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Barbant! je n ai pas terminé Lucien Leuwen... et le Rouge et le noir ça a été plutot laborieux (dire qu on l étudie en première, enfin à mon époque...), de toute façon je donnerai tout Stendhal pour ne serai ce que L éducation sentimentale de Flaubert....
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Swann




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Messages: 2643


Posté: Dim 12 Aoû 2007 8:20
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« Mop1 » a écrit:
Des goûts et des couleurs....Lucien Leuwen est le roman de Stendhal que j'ai préféré, parmi les trois que j'ai lus (Le rouge et le noir que j'ai beaucoup aimé et la chartreuse de Parme qui m'a paru insupportable). Il est vrai qu'il est considéré comme "le plus balzacien" des romans de Stendhal, et que j'aime beaucoup plus Balzac que Stendhal.

J'ai beaucoup aimé "Le Rouge et le Noir", ainsi que "La Chartreuse de Parme" (par contre, cette dernière m'est presque sortie de la tête : à relire dans quelques années). Quant à Balzac, il fait lui aussi partie de la liste du Challenge Mon Ecrivain Préféré : "Le Chef-d'oeuvre inconnu" ne m'a heureusement pas réservé la même déconvenue que "Lucien Leuwen".
« Mop1 » a écrit:
Tout ce que je puis dire, c'est que j'avais apprécié la description de la bougeoisie de province, la relation des manoeuvres politiques et électorales, et la place relativement moins importante de l'intrigue amoureuse, par rapport aux deux autres romans que j'ai cités.

On peut dire que j'ai apprécié tout cela moi aussi. C'est le genre de roman que je recommanderais volontiers à un étudiant en Histoire ou qn qui s'intéresse à la Restauration : le travail de reconstitution me paraît sérieux.
Le place de l'intrigue amoureuse, surtout quand elle est répétitive et outrée comme dans ce roman, a plutôt intérêt à être courte ! (*smiley diabolique*). J'étais bien contente que le roman soit inachevé car le retour de Mme de Chasteller, ses mouchoirs et ses vapeurs, était apparemment prévu...


Dernière édition par Swann le Dim 12 Aoû 2007 8:23; édité 1 fois
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Swann




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Posté: Dim 12 Aoû 2007 8:22
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« amiread1 » a écrit:
de toute façon je donnerai tout Stendhal pour ne serai ce que L'éducation sentimentale de Flaubert....

Moi pas, mais il faudrait que je le lise, car (honte ! honte !) je ne connais que le feuilleton qui en fut tiré et quelques extraits.

Question Fait curieux, tous les hommes que je connais et qui ont lu L'Education sentimentale en sont fan... et pas toujours les femmes.
Comment l'expliquer, si la remarque est pertinente ?
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C-Maupin




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Posté: Dim 12 Aoû 2007 11:07
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J'aime beaucoup l'éducation sentimentale de Flaubert, et, mis à part les contes (de véritables bijoux), c'est la seule oeuvre de Flaubert que j'aime. J'avoue que je n'ai pas lu Bouvard et Pécuchet, mais je ne supporte pas madame Bovary et je n'ai pas réussi à passer les premières pages de Salammbô.
Si je l'ai mis dans le défi MEP, c'est à cause de l'éducation sentimentale et des contes, et pour essayer de m'obligeer à lire Salammbô, mais je ne suis pas sûre de réussir !
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Auteur    Message
Swann




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Posté: Dim 12 Aoû 2007 12:04
MessageSujet du message:
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« Mop1 » a écrit:
J'aime beaucoup l'éducation sentimentale de Flaubert, et, mis à part les contes (de véritables bijoux), c'est la seule oeuvre de Flaubert que j'aime. J'avoue que je n'ai pas lu Bouvard et Pécuchet, mais je ne supporte pas madame Bovary et je n'ai pas réussi à passer les premières pages de Salammbô.

Very Happy Je crois que nous n'avons pas tout à fait les mêmes goûts, voilà l'explication : j'aime beaucoup Mme Bovary (sans être inconditionnelle). Salammbô est sur ma pile-à-lire, tu en auras un jour des nouvelles.[/quote]
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amiread1



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Posté: Dim 12 Aoû 2007 23:25
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Pourquoi les hommes préferent ils Fréderic Moreau a Julien Sorel ou a Lucien Leuwen ? je ne sais pas Swann ! Je trouve L éducation sentimentale trés moderne, presque éxitentialiste...si,si. On a toujours opposé Flaubert a Stendahl, (encore récemment Dominique Fernandez invité de Katleen Evin sur F.inter), Le"s personnages de Stendahl sont trés préoccupé de leur petit "égo", ils y a chez eux une indifférence au monde...
Et puis M... on pourrait discourir a n en plus finir des mérites de l un , de l autre..

Fréderic et ses amis sont au café-concert :

Et la Sphinx (Vatnaz, une de leurs amies), buvait de l eau de vie, criait à plein gosier, se démenait comme un démon. Tout à coup ses joues s enflèrent , et ne résistant plus au sang qui l étouffait, elle porta sa serviette contre ses lèvres, puis la jeta sous la table. Fréderic l avait vue.
-" Ce n est rien !"
Et à ses instances pour partir se soigner, elle répondit lentement.
-"Bah! a quoi bon ? autant ça qu autre chose! la vie n est pas si drole!"
Alors il frissonna, pris d une tristesse glaciale, comme s il avait apperçu des mondes entiers de misère et de désespoir, un réchaud de charbon prés d un lit de sangles, et les cadavres de la morgue en tablier de cuir, avec le robinet d eau froide qui coule sur leurs cheveux.

Voila pourquoi , entre autre, j aime L éducation; bon je ne suis pas dupe , je sais bien que Flaubert était un roi de l artifice et que ses phrases sont ciselées "au milimètre"...
_________________
"Lorsque Dieu créa le temps il en créa suffisamment". Proverbe irlandais.
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