Salutations distinguées.
Barre d’immeuble, cabine téléphonique et panneau de stop tagués, ciel plombé, le cadre de la banlieue est posé afin que les personnages, perdants patentés, puissent déployer leurs espoirs les plus flous. Vincent a la trentaine fatiguée. Il cause bien, il pense droit mais il prend la tangente quand les responsabilités le menacent. Il a pourtant décidé de reprendre sa vie en main, du poil de la bête et le taureau par les cornes, toutes choses assez abstraites face aux contingences et aux aléas de la vie. Vincent pense se refaire en braquant un fourgon convoyant des fonds. Il s’associe avec Gaby Rocket, authentique loser portant banane et perfecto comme si le temps ne corrodait pas aussi les rockers, leur jeunesse et leurs idéaux. Vincent imagine son plan réussir sans effusion de sang. Il se leurre peut-être et son amour abandonné en Afrique qu’il croit pouvoir retrouver en vainqueur n’est probablement plus aussi accessible.
Wilfrid Lupano, anar dans l’âme, est une voix qui compte aujourd’hui parce qu’elle porte un humanisme salutaire qu’on retrouve dans toutes ses histoires. « Ma révérence » ne fait pas défaut dans l’œuvre conséquente du talentueux scénariste de bandes dessinées. Les différents flashbacks éclairant le passé des protagonistes rendent le récit toujours plus prenant. Le lecteur sent le mur arriver à mesure que le projet de braquage se précise et pourtant il espère une issue. Rodguen délivre un dessin caricatural et expressif servi par des mises en page réussie. Le bad trip social dispense aussi quelques embellies qui n’en sont, par contraste, que plus resplendissantes.
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