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[Le grand aveuglement | Charles Enderlin]
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apo



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Posté: Sam 14 Déc 2024 20:44
MessageSujet du message: [Le grand aveuglement | Charles Enderlin]
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De la Guerre des Six Jours (juin 1967), entraînant l'occupation militaire par l'armée israélienne du plateau du Golan, de la Cisjordanie, de Jérusalem-Est, du Sinaï et de Gaza, à la prise du pouvoir par le Hamas à Gaza (septembre 2005), cet ouvrage de référence chronique avec une minutie remarquable les étapes de la métamorphose de la question palestinienne d'un conflit national, en vue de la création de deux États souverains aux frontières sécurisées (Israël et Palestine), en un affrontement religieux fondamentaliste, métaphysique et presque eschatologique - sur la survie de l'un des deux peuples irréconciliablement ennemis. D'un point de vue philosophique, le fond de la métamorphose, semble-t-il, est la confiance ou la méfiance réciproque dans la possibilité de la réalisation de la paix, étant entendu que celle-ci passe par un processus qui requiert des négociations avec des concessions mutuelles. D'un point de vue géopolitique, en revanche, nous assistons avec désolation à la reproduction à l'échelle régionale moyen-orientale de la logique systémique globale des blocs : l'Occident favorisant l'ascension de l'islam radical partout dans le monde musulman en vue de l'affaiblissement de ses antagonistes Russo-arabo-iraniens. Le titre de l'essai prend le parti rationaliste, humaniste et laïque de révéler que le choix du fondamentalisme religieux, islamiste et juif, conduit au désastre, c'est-à-dire à une situation où l'insécurité et le conflit permanents empêchent l'épanouissement démocratique et le développement des sociétés, où une éventuelle supériorité militaire (temporaire) mène paradoxalement le vainqueur à l'impuissance. Mais la démonstration, avec toute la rigueur journalistique d'une succession d'événements et de perceptions qui se déroulent au jour le jour, passe par les bévues des responsables politiques, des incompréhensions réciproques, des décisions insuffisamment informées, des interprétations biaisées, des erreurs de calcul ou simplement des calculs à court terme, électoralistes, voire égoïstes.
Ainsi, l'un des héros méconnus de ce livre est un certain Avner Cohen, ancien responsable des affaires religieuses de l'administration militaire israélienne de Gaza qui, dès 1986 et durant vingt ans, a tenté de mettre en garde ses supérieurs sur la dangerosité du mouvement qu'était en train de créer le cheikh Ahmed Yassine à Gaza, le futur Hamas que tout le monde connaît aujourd'hui. Ainsi, lors de l'éclatement de la guerre Iran-Irak en 1980, Israël décide d'armer secrètement la République islamique malgré l'embargo américain, car Saddam Hussein lui semble un ennemi plus menaçant que les chiites, tout en perpétuant l'occupation du plateau du Golan puis du Sud-Liban qui pérennisent le conflit contre la Syrie et le Liban et provoque inévitablement le renforcement du Hezbollah. Ainsi, suite aux accords de paix d'Oslo, en 1995, « le conseil des rabbins d'Eretz Israël poursuit ses débats autour de la question : "Yitzak Rabin encourt-il la peine de mort ?" et, en février, adresse un texte à tous les rabbins du pays ainsi qu'aux membres des conseils des Sages de la Torah des partis ultra-orthodoxes » (pp. 237-238), et il n'est donc pas étonnant que le Premier ministre lauréat du prix Nobel pour la Paix soit bientôt assassiné par Yigal Amir « un pur produit de l'extrême droite nationaliste religieuse ». Ainsi enfin, lorsqu'un attentat est perpétré par le Hamas à l'hôtel Park à Netanya, le soir de la Pâque juive de mars 2002, qui fait trente morts et cent quarante blessés, c'est le QG de Yasser Arafat, grand rival du Hamas qui est bombardé. L'objectif des islamistes était de torpiller l'initiative saoudienne de paix votée par la Ligue arabe, l'objectif israélien était de détruire encore un peu plus les institutions de l'Autorité palestinienne : objectifs atteints !
Le plus émérite expert français de la question israélo-palestinienne, correspondant en poste à Jérusalem depuis le début des années 1970, raconte dans cet ouvrage une histoire qui s'écarte des discours officiels des deux camps, grâce à des sources souvent exclusives faisant état d'arrière-plans parfois assez crapuleux : trahisons, doubles jeux, myopie politicienne. À l'heure où une actualité sanglante a remis sur le devant de la scène cette problématique de politique internationale à l'apparence si irrésoluble, une ré-edition de cet ouvrage d'histoire vient de paraître. Sans aucun doute l'ambition de l'auteur, en faisant une lumière incommode sur des aspects aussi éclairants qu'inavouables d'un tel écheveau, n'est autre que de contribuer à éveiller la conscience qu'une paix juste et durable est possible dans la région, à condition cependant de changer de paradigme politique.



Table :

1. Le réveil :

- Le Frère Ahmed Yassine entre en scène
- Le monde selon Sayyid Qutb
- La guerre des Six Jours profite aux religieux
- Que faire des territoires conquis ?
- Le renseignement n'entend rien, ne voit rien
- La stratégie du fait accompli

2. Antidotes :

- La confrérie s'installe à Gaza
- L'OLP, cible principale
- La guerre de 1973 et l'éclatement du front arabe
- Le mouvement messianique passe à l'offensive
- Sadate à Jérusalem, une occasion manquée
- L'obstination israélienne, le refus arabe, la prudence d'Ahmed Yassine
- L'onde de choc iranienne
- Autonomie ou colonies en Cisjordanie ?

3. Les armes :

- Hébron, cible des fondamentalistes
- La défaite des modérés
- Quand Israël joue la carte iranienne
- Des intellectuels interpellent le pouvoir
- Du massacre de Sabra et Chatila...
- … à la naissance du Hezbollah
- L'échec d'une politique
- Ahmed Yassine est-il dangereux, oui ou non ?
- Quand le terrorisme juif apporte des arguments aux Frères musulmans

4. Combattre l'OLP par tous les moyens :

- Dès 1986, un accord avec l'OLP était possible
- À Gaza, les militaires israéliens s'inquiètent
- Aider l'islam dans son combat contre le communisme
- Gaza n'intéresse décidément pas le gouvernement israélien
- Ni le Likoud ni les travaillistes ne veulent négocier avec l'OLP
- Avner Cohen n'est plus seul
- L'intifada, pour sortir de l'impasse
- En Cisjordanie, comme à Gaza
- Aveuglement à Gaza

5. Hamas :

- De l'aveuglement de Reagan...
- … à la prise de conscience de Bush
- Les orthodoxes contre Shimon Peres
- Désormais, les services israéliens y voient très clair...
- … mais les politiques résistent
- Quand l'OLP joue le jeu
- En Israël, une majorité pour la paix

6. L'espoir :

- Cap sur Oslo
- Rabin ne veut pas évacuer les colonies
- La paix et ses ennemis
- La terreur en héritage
- Crisa à Gaza

7. Les assassins de la paix :

- Qui a tué Rabin ?
- Le Hamas passe à l'action
- Iran et Hezbollah veillent à attiser les braises
- La victoire des néoconservateurs
- Une fois encore, les services ne voient rien venir
- Quand le Likoud préfère une mauvaise traduction à la vérité
- Le double jeu du gouvernement
- Que se passera-t-il en 2027 ?

8. Le fiasco :

- Ben Laden entre en jeu
- Les colons contre Netanyahu
- Le double jeu d'Ehoud Barak
- Quand Barak ridiculise Arafat au profit du Hezbollah
- L'échec de Camp David : qui est responsable ?
- Arafat, bouc émissaire

9. La victoire d'Ariel Sharon :

- L'armée contre les Services
- Sharon, ou le choix de l'affrontement
- Le Hamas déclare la guerre
- Hamas, OLP, Ben Laden, même combat !
- Le Hamas porté par le vent de l'histoire
- Le Hamas attaque ? Sharon riposte contre Arafat
- Arafat neutralisé
- Israël se retire de Gaza, l'heure du Hamas est arrivée
- La défaite du Fatah
- Le Hamas au pouvoir
- L'impuissance du vainqueur

Epilogue



Cit. :


1. « Al-Qaida est issue de la guerre en Afghanistan. Zbigniew Brzezinski, le conseiller à la sécurité nationale du président Jimmy Carter, à l'origine de cette politique, dira en 1998 : "Qu'est-ce qui est le plus important au regard de l'histoire du monde ? Les Talibans ou la chute de l'empire soviétique ?" Fragile explication qui omet de rappeler qu'après le retrait de leurs troupes, des responsables russes avaient proposé à Washington d'agir de concert contre le danger commun : l'islam radical.
En 1982, la guerre d'Ariel Sharon au Liban, contre l'OLP et le nationalisme palestinien, aura eu des conséquences identiques : l'émergence du Hezbollah, à qui Israël aura offert pendant dix-huit ans une zone de conflit privilégiée en occupant le sud du pays.
[…]
Ariel Sharon, ministre ou chef du gouvernement, ne s'embarrassera pas outre mesure du mouvement messianique [l'intégrisme religieux israélien qui a assassiné Yitzak Rabin pour saborder le processus de paix]. Il l'instrumentalisera même à l'occasion, pour mener à bien sa politique d'implantation dans les zones des territoires occupés nécessaires, selon lui, à la sécurité du pays. Son ennemi prioritaire a toujours été l'OLP, la seule organisation palestinienne susceptible d'obtenir des concessions territoriales d'Israël dans le cadre d'une paix que Sharon juge impossible. Ainsi s'explique sa stratégie constante. » (pp. 8-9)

2. « […] Reouven Paz diffuse un rapport, début 1987, qui va dans le même sens [que celle d'Avner Cohen] :
"[…] Selon notre analyse, pour Israël, l'activité de ces groupes d'invitation à l'islam représente, à long terme, un danger potentiel plus important que les groupes révolutionnaires violents, et cela pour plusieurs raisons :
1/ [la Moujamma al-Islami (ancêtre du Hamas)] est très organisée. Sa capacité à faire face aux autres groupes musulmans est importante, aussi bien dans le domaine du recrutement de militants que dans la prise de contrôle de mosquées et des autres centres religieux, au sein des universités et des diverses associations.
2/ Ce genre d'activités non violentes et non subversives accordent aux Frères musulmans une immunité face aux autorités militaires israéliennes. Leur capacité de survie est donc plus importante.
3/ Sa coopération avec les éléments pro-jordaniens en Cisjordanie lui confère une certaine légitimité.
4/ Son influence est très importante sur les Arabes israéliens et, selon notre analyse, la ligne verte n'existe plus pour les Frères musulmans. Ils entretiennent des liens avec les Arabes israéliens et les Palestiniens des territoires.
5/ Les Frères musulmans ont bâti une infrastructure indépendante dans les Territoires, essentiellement grâce au soutien budgétaire du Waqf, ce qui leur confère une capacité de résistance à long terme et la possibilité d'élargir leurs activités.
Cette organisation crée un terreau fertile pour la diffusion de l'idéologie du djihad, surtout au sein de la jeune génération." » (pp. 146-147)

3. « En mai [1998], dans une interview à la chaîne américaine ABC, Ben Laden évoque à nouveau l'affaire palestinienne :
"Les Palestiniens sont assassinés et, s'ils ont le malheur de répliquer, de la seule façon qu'ils peuvent, ils sont immédiatement taxés de terrorisme. […] La violence de l'Amérique à l'encontre des musulmans n'a cessé de croître depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. À travers l'histoire, les États-Unis n'ont jamais fait la différence entre les civils et les militaires, comme le prouvent les bombardements atomiques sur Hiroshima et Nagasaki. Alors que l'Amérique n'a pas de religion qui l'empêche de commettre de tels actes contre des femmes et des enfants, pourquoi devrions-nous, nous, faire une différence ? Ils sont tous concernés."
Le conflit israélo-palestinien est désormais l'un des principaux prétextes mis en avant par les tenants du djihad global. Mais le Hamas, on l'a vu, a refusé d'en faire partie et se consacre entièrement à la libération de la Palestine. Certes, l'organisation d'Ahmed Yassine diffuse de la propagande anti-juive, reprenant les grands thèmes de l'Ikhwan et de Sayyid Qutb, mais elle prend toujours grand soin de ne pas attaquer les régimes arabes modérés qui lui accordent un soutien sous une forme quelconque ou risqueraient d'entraver ses opérations. Le 8 décembre 2003, Khaled Masha'al expliquera d'ailleurs, dans une interview au quotidien de langue arabe _Al-Hayat_, qui paraît à Londres :
"La vision du Hamas n'autorise pas le déploiement de ce qu'on appelle aujourd'hui la violence, sauf contre l'occupant ennemi. Notre combat se limite aux sionistes qui occupent notre terre en Palestine. Bien que les États-Unis fournissent à Israël la plupart de ses armes, y compris des hélicoptères Apache, des avions F16, et en dépit de l'arrestation du docteur Moussa Abou Marzouk, nous n'avons pas déclaré la guerre à l'Amérique." » (p. 279)

4. « En 2009, selon un sondage, plus de 45 % des juifs israéliens resteront persuadés que la seconde Intifada a éclaté parce que Arafat l'avait planifiée. Seuls 15 % acceptent l'autre thèse selon laquelle ce fut un soulèvement populaire. La moitié des personnes interrogées considèrent que les Palestiniens sont responsables de l'échec du processus d'Oslo. Pour 6 %, Israël en est responsable, et 28,4 % rejettent la responsabilité sur les deux parties.
Le Hezbollah va contribuer à renforcer les Israéliens dans le sentiment qu'ils sont victimes d'une offensive tous azimuts. » (p. 316)

5. « Le professeur Sergio Della Pergola, de l'Université hébraïque, leur a répondu : "La question fondamentale dans ce débat ne porte pas sur la date spécifique à laquelle les juifs perdront ou non la majorité sur l'ensemble du territoire entre la Méditerranée et le Jourdain. […] Le véritable problème est le suivant : quel type de société civile voulons-nous bâtir dans l’État d'Israël ? Voulons-nous une société dotée d'une identité juive dont nous serons fiers, ou d'un conglomérat multinational tourmenté par des tensions ethniques comme au Liban, à Chypre, au Burundi, ou dans l'ex-Yougoslavie ? Aspirons-nous à vivre dans une société qui respecte les principes démocratiques fondamentaux de gouvernement et de représentation populaire, ou dans une société ressemblant à l'ancienne Afrique du Sud ? [...]" » (p. 362)

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