Dans ce livre Albert Londres dénonce les méfaits de la colonisation française en Afrique, pour son inhumanité et aussi son non-sens économique.
Il ne cache pas l’inhumanité de certaines pratiques locales (tyranneaux faisant tomber tête sur tête, sacrifices humains, condition féminine épouvantable) mais montre que non seulement la France est incapable de s’y opposer (ce qui disparaît au grand jour, perdure en cachette), mais que ses lois aggravent tout. Par exemple en ce qui concerne l’esclavage (évidemment non reconnu par la France mais pratiqué de manière relativement bon enfant par les chefs africains) :
« Au nom de la loi blanche chacun ne doit que ses quinze jours [de corvée] ; au nom de la coutume noire, le captif doit quinze plus quinze plus quinze…tout ce que les autres ne font pas !
Ainsi tout le monde est content. La loi blanche est humaine et les coutumes d’Afrique sont respectées ! «
Enfin et surtout, la France fait réaliser toutes les infrastructures au « moteur à banane », bien meilleur marché que le moteur à pétrole :
« Les belges venaient de construire 1200 km de chemin de fer en trois ans, avec des pertes ne dépassant pas trois mille morts, et chez nous, pour 140 km, il avait fallu dix-sept mille cadavres ! »
Mépris de la vie humaine insupportable, mais aussi non-sens économique : richesses locales inexploitables par manque d’infrastructure et dépeuplement (les noirs qui ne sont pas morts sur les chantiers prennent la fuite dans les pays voisins).
Cette enquête, qui semble bien documentée, est en outre très agréable à lire : le style de l’auteur est simple et clair, et le récit est émaillé d’anecdotes souvent drôles (Par exemple : un africain, ayant dû partir deux ans en métropole avait confié sa femme à son frère et à son retour il porte plainte, devant l ‘administrateur colonial, contre son frère qui ne s’est pas « occupé » de sa femme. En effet il escomptait bien à son retour trouver un enfant qui l’aurait enrichi ! Le frère reconnaît sa faute mais préfère payer l’amende car la femme ne lui plaisait pas)
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