Les jardins suspendus.
En mars 1867, John Muir, alors âgé de 29 ans, est atteint de cécité provoquée par un accident à la scierie où il travaille en tant qu’ingénieur. Quand il recouvre la vue de manière inespérée, il sait qu’il doit partir à la découverte de la nature sauvage de l’Amérique. Avec un équipement rudimentaire : « une carte, une boussole, une presse à plantes… une gourde, une gamelle… du pain, de la farine, du thé et trois livres, un volume de poésie de Burns, Le paradis perdu de Milton et un Nouveau Testament », John Muir s’élance à pied dans l’immensité américaine déjà mise à mal par les exploitations effrénées des colons. La guerre de Sécession (1861-1865), conflit meurtrier et traumatisant, a laissé des traces avec les bandits de grand chemin et les esclaves noirs fraîchement affranchis, souvent paupérisés. John Muir croise d’inquiétantes figures et des personnalités remarquables. Quand le gîte et le couvert lui sont offerts, il peut expliquer sa démarche et trouver des mots simples très parlant auprès d’hôtes d’accueil qui se révèlent presque toujours à l’écoute et compréhensifs. La faim et la maladie n’entament jamais la détermination du marcheur impénitent. Quand il aborde la Californie, il approche du Graal, l’extraordinaire vallée perchée du Yosemite, dans la Sierra Nevada.
Il a fallu du culot à l’auteur et à l’éditeur pour se lancer dans une entreprise aussi risquée qu’un roman graphique en noir et blanc, à propos d’un écrivain naturaliste américain, John Muir (1838-1914) de la fin du XIXe siècle, relativement inconnu dans nos contrées. Le résultat est probant. Le volume relié, avec tranchefile et pages de garde, est en soi un bel objet. Le grand format et la qualité de l’impression rendent grâce au crayon léger et au trait fouillé de Lomig. Humanité, beauté, grandeur et silence parcourent cette bande dessinée superbe qui ne s’épuise pas à la première lecture. Il suffit d’ouvrir l’album à n’importe quelle page pour se laisser porter par l’élégance du graphisme et se faire happer dans une aventure exceptionnelle.
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