La remarquable série télévisée américaine d’Alan Ball, Six Feet Under, réalisée entre 2001 et 2005, raconte en cinq saisons et soixante trois épisodes le quotidien d’une petite entreprise de pompes funèbres créée et gérée par la famille Fisher. Une étude paraît aujourd’hui aux PUF dans une nouvelle collection consacrée aux séries télévisées marquantes. Il s’agit de relater la vie ordinaire d’une classe moyenne où chacun cherche sa place, essaie de vivre pour lui mais avec les autres. Jamais ennuyeuse ni moralisatrice, la série dresse une galerie de personnages finement dessinés psychologiquement et entre profondément dans leur intimité sans tabou ni vulgarité. L’essai du philosophe français va éclairer la série en proposant six thèmes : l’individu, la famille, l’amour et la sexualité, le travail, la mort, la recherche d’un sens à la vie, en y alternant des portraits des principaux personnages et une analyse des épisodes marquants. Bien que le travail de mise en lumière de Tristan Garcia s’enlise quelquefois dans un jargon ennuyeux [« arcs narratifs » ; « l’individu est le terminus ab quo et ad quem… » ; « …comment, parce que nous sommes tous des individus, en devenir un chacun ? »], il sait bien faire la synthèse des caractères et des thèmes. Le lecteur revoit les épisodes défiler et s’aperçoit qu’il n’a rien oublié au passage. Il peut aussi se replacer dans la communauté des téléspectateurs et se rendre compte que les émotions éprouvées ont été partagées par beaucoup : « Immense œuvre étalée sur cinq années, Six Feet Under ressemble à une vaste opération de chimie qui dissout nos pensées, nos croyances, nos désirs et nos sentiments dans l’existence ordinaire ; et quel est le précipité obtenu à la fin ? Notre conscience de nous-mêmes, en larmes ». Le lire c’est encore ressentir une émotion poignante à l’idée d’un dernier épisode de la série qui défile dans un éternel recommencement, en vain, en pure perte, magnifique, inéluctablement.
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